• Le programme dans une perspective historique

    Toujours à la recherche d'efficience, l'école belge s’est constamment laissée pénétrer des grandes idées pédagogiques. Grâce aux idées des Rousseau, Dewey, Claparède, Decroly, Wallon et Piaget - pour ne citer que les principaux - un souffle vivifiant a pénétré dans nos programmes et nos méthodes.

    La conception pédagogique du MILIEU a singulièrement évolué. D'abord préconisé comme moyen intuitif et comme prétexte dans le Plan de 1922 (leçon de choses), le milieu fut proposé comme support de toute l'activité scolaire dans le Plan d'Etudes de 1936.

    L'étude du milieu par l'observation active était alors la base et le point de départ du programme. L'éducation et l'instruction étaient basées sur la formation totale de l'enfant qui se développe au contact du milieu.  Ce fut l'époque de l'éclosion des centres d'intérêt dans les classes.

    Le Plan d'Etudes de 1957 ramena l'utilisation du milieu à des fins plus limitées, prônant « l'éducation et l'instruction par l'observation du milieu ».  Mais cette fois, le milieu fut utilisé en tant que motivation de la plupart des activités scolaires.

    A la leçon de choses de 1922 succéda la leçon d'observation active parce que motivée. Au milieu - prétexte de 1922 se substitua le milieu - moyen de 1936 et 1957.

    En 1973, soit 15 ans après la parution du Programme de 1957, l'école belge se remit une fois de plus en question : l'environnement « n'est plus une réalité figée mais une réalité mouvante dans laquelle chacun est impliqué continuellement et sur laquelle chacun peut et doit agir ».

    Pour dominer cet environnement de plus en plus complexe, pour pouvoir agir sur lui, l'enfant, à la recherche de moyens d'action efficaces, doit, plus que jamais s'exercer, avec l'aide de l'adulte, à y déceler des problèmes et à les résoudre dans une optique de plus en plus humaine.

    Saisir l'action de l'homme sur son milieu, dans les faits de vie, connaitre, juger, apprécier et mettre en relations hommes, êtres et événements devient un but.

    Malgré l'évolution de la conception du milieu à travers ces différents plans d'études, l'école belge de 1973 resta dans la ligne qu'elle s'est tracée depuis le début : s'adapter à l'évolution du monde.

    En 1973, en effet, un nouveau programme fixa les objectifs et les principes généraux de notre école fondamentale. Ceux-ci ont été explicités dans les brochures

    • Éduquer pour le monde de demain
    • Exploration et conquête de l'environnement (Initiation aux sciences et à l'histoire)

    Depuis le début des années ’70, notre école fondamentale, liée à la vie, veut former les enfants en s'ouvrant au milieu environnant.

    Dans son effort de rénovation et d'adaptation à son temps, l’école fondamentale souhaite placer l'enfant dans des situations problématiques qui l’entraînent à s'exercer lentement à l'exploration et à la conquête de son environnement pour devenir l'adulte apte à s'intégrer dans une société quelle qu'elle soit et dont il devra rester le maître.

    Notre école veut aussi aider l'enfant à vivre pleinement son enfance

    • en l'amenant à affronter et à résoudre les problèmes réels qu'il se pose devant les multiples faits de la vie de son milieu, aux différents niveaux de son développement ;
    • en l’entraînant à adopter constamment une attitude culturelle dans son exploration et sa conquête de l'environnement.

    L'exploration et la conquête de l'environnement réclament l'intervention de plusieurs disciplines. Résoudre un problème relatif à l'environnement met d'emblée toutes les disciplines sur le même pied.

    Les différentes disciplines, au lieu de s'élargir en un faisceau divergent, convergent vers un même point : la solution du problème.

    La situation d'apprentissage ne se conçoit donc que dans une approche pluridisciplinaire des problèmes.

    Mais le programme de 1985 (« Matières et programmes ») nous présentait encore trois disciplines dites d'éveil de manière bien séparée : l’histoire, la géographie, les sciences, aux côtés de la langue maternelle et de la mathématique.  Mais, quelle que soit la présentation des programmes et l'organisation de leur contenu, il nous faut accorder la priorité au décloisonnement des branches et des leçons dans le cadre d'une réelle exploration et conquête de l'environnement par l'enfant et ses pairs avec l'aide du maître, de l'équipe des maîtres.

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  • Perspective historique du développement de l'étude scientifique

    Cette perspective historique va nous permettre d’examiner comment fut envisagée l'étude scientifique, historique, géographique, scientifique... dans notre société occidentale. Elle s’applique donc tant à la géographie, à l'histoire, aux sciences qu’à la mathématique.

    La SCOLASTIQUE, philosophie scolaire, science des écoles au Moyen Age, prit naissance dans les écoles abbatiales et épiscopales. Elle atteignit l'apogée de son développement dans les universités de Paris et d'Oxford.

    Son caractère essentiel consistait à subordonner toute la science à la théologie, dont l'unique source était la Bible expliquée par les pères, les conciles et le pape. Elle n'avait pas le droit d'examiner les vérités formulées par la théologie.

    A côté de la religion qui est la base de tout, le cadre scientifique de la scolastique renferme les sept arts dits libéraux :

    • le TRIVIUM (grammaire, rhétorique, dialectique) et
    • le QUADRIVIUM (arithmétique, géométrie, musique et astronomie).

    Les sciences naturelles, rentrant dans la sphère du nominalisme, furent proscrites jusqu'à la fin du Moyen Age.

    Roger Bacon dont les conceptions l'ont fait considérer comme l'esprit le plus vaste et le plus hardi du Moyen Age, reprocha à la scolastique sa crédulité aveugle pour Aristote et son ignorance de l'Antiquité. S'il n'a pas formulé les lois de l'observation et de l'induction qu'il appliquait déjà, il a cependant préparé la voie à Copernic,  facilité les travaux de Newton en optique par l'explication du mécanisme de la vision, de la réfraction.

    Avec François Rabelais, c’est l’encyclopédisme et le retour à la nature ! C'est surtout dans l'enseignement des sciences que Rabelais s'éloigne des traditions suivies dans les écoles. Rejetant la méthode déductive et les hypothèses chimériques auxquelles la science avait forcément recours pour établir ses déductions plus subtiles qu'exactes, Rabelais recourt à l'observation et à l'induction.

    Montaigne qui rejette la science purement livresque, a montré qu'il faut combiner l'enseignement oral direct et l'enseignement par le livre, le résumé fait par l'élève et celui fait par le maître.  Le vrai procédé se trouve dans leur emploi combiné qui soutient l'intérêt, excite les facultés et donne la vraie connaissance.

    Plein de confiance dans l'avenir des sciences naturelles, Francis Bacon, a entrevu la grandeur des applications, résultat du travail intelligent. Il a appliqué une méthode d'induction basée sur l’expérimentation (N.B. Aristote basait sa méthode d'induction sur le raisonnement !). Francis Bacon ne raisonnait pas ; il expérimentait et les expériences mêmes établissaient la théorie.

    Comenius accordait une place considérable à la formation scientifique.  Disciple fervent de Francis Bacon, il recommanda de rendre l'enseignement intuitif, basé sur une étude concrète de la réalité, sur l'observation vivante et féconde de la nature.

    La première partie du «Discours sur la méthode», intitulée «Considérations sur les sciences» montre l'incertitude des connaissances de Descartes. Pour obtenir la certitude, Descartes remplace l'obligation de croire par le libre-examen. Il soumet toutes les notions à l'évidence que donne la raison.

    Prêtres pieux, les Oratoriens, étaient les amis de la science. La partie scientifique de leur programme comprenait les sciences naturelles, physiques et mathématiques. Ils insistaient sur la formation du jugement.

    Pour Jansenius, le jugement est tout si le raisonnement l'accompagne !

    Avec John Locke débute l'ère de l'utilitarisme ! Il rejeta les idées innées et considéra la sensation comme point de départ de toute notion.  C'est sur elle et par elle que la réflexion agit pour en tirer des pensées, simples et concrètes d'abord, d'où l'esprit s'élève aux idées complexes, abstraites et générales.  La conséquence naturelle de ce système était l'enseignement par les choses, l'observation et l'expérience comme point de départ de toute étude, la condamnation de la méthode déductive.

    Pour John Locke, qui veut surtout que l'enfant ait l'amour et le respect de la science, l'étude sera toujours attrayante. Les sciences seront enseignées intuitivement.  Elles seront de véritables leçons de choses.

    Rollin, humaniste par excellence, fait une place aux sciences, même dans l'enseignement élémentaire. Il trouve indigne de l'homme d'ignorer les merveilles de la nature. Elles fortifient le sentiment religieux puisqu'elles révèlent la grandeur divine.

    Au 18ème siècle, le français et les sciences étaient sacrifiés dans l'enseignement secondaire.  Par contre, l'histoire et la géographie avaient une place d'honneur aux côtés des langues anciennes, de la religion et de la rhétorique.

    Jean-Jacques Rousseau préconisa le recours à la nature. Il donna à son élève des leçons de choses. Il l'instruisit par tout ce qu'il voyait, entendait et sentait.  L'observation attentive et la perception nette étaient de toute nécessité pour avoir des idées exactes.

    Le programme qu'avait élaboré Diderot pour l'enseignement secondaire donnait la prédominance aux sciences.

    Pour Kant, « le meilleur moyen de comprendre, c’est de faire ! »

    Le 19ème  siècle accorda aux sciences une place en rapport avec leur importance. L'école devait vulgariser les sciences, les fortifier.

    Avec Pestalozzi, les élèves étudiaient le lieu natal sur le terrain même. Ils prenaient des croquis. Les sciences naturelles devaient être enseignées par des exercices d'intuition et complétées dans des excursions.

    Pour Herbert Spencer, l’éducation, basée sur la science, devait préparer la vie complète. Les sciences occupaient donc une place plus que prépondérante.

    Pour Auguste Comte, les sciences constituaient le fondement de l'éducation. Ce sont elles qui ont conduit au positivisme.

    John Dewey, plus social que Descartes, nous a dit comment nous pensions. Pour lui, c'était la pensée réfléchie qu'il importait de développer car cette pensée réfléchie s'apparente à la pensée scientifique. C'est pourquoi Dewey a fixé cinq étapes à suivre pour résoudre un problème :

    1. Prise de conscience et compréhension du problème
    2. Recherche de la clarté : faire le point
    3. Emission d'hypothèses et recherche de solutions
    4. Application rationnelle : discussion pour le choix de la solution
    5. Vérification expérimentale

    Se référant à des travaux américains récents, Jean Piaget a constaté qu'il existait une discordance complète entre l'esprit de la science en marche et l'enseignement des sciences à tous les niveaux. C'est pourquoi Jean Piaget a attribué une importance essentielle à l'esprit expérimental. Pour lui, l'initiation aux  sciences physiques et naturelles est obligatoire.

    Son ouvrage «où va l'éducation ? Comprendre, c'est inventer » comprend notamment une partie prospective.  Sa thèse est la suivante : un enseignement des sciences devrait permettre de faire comprendre à des enfants du niveau primaire certains phénomènes physiques simples au moyen de dispositifs manipulés par l'enfant avec une part maximale de spontanéité et d'activité de recherche.

    SYNTHÈSE de cette perspective historique :

    • Le Moyen Age est fort peu soucieux de sciences.
    • Avec la Renaissance, c'est I’encyclopédisme qui s'installe, avec une « fenêtre ouverte » timidement sur la nature (compilation mentale de l'idée scientifique).
    • L'ère des lumières ouvre deux courants qui s'affrontent encore aujourd'hui : l'encyclopédisme français et l'utilitarisme anglo-saxon.
    • ROUSSEAU, en précurseur génial, a voulu donner les moyens d'acquérir l'un et l'autre.

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  • La conquête de l'environnement

    La conquête de l'environnement est une option du professeur Arnould Clausse (Cf. « Philosophie de l'étude du milieu » 1961 et  « Philosophie et méthodologie d'un enseignement rénové » 1972).

    Deux définitions du terme « ENVIRONNEMENT » 

    1. Un colloque qui eut lieu le 21 octobre 1971 à Aix-en-Provence a défini l'environnement comme étant «l’ensemble des êtres et des choses qui composent l'espace proche ou lointain de l'homme sur lesquels il peut agir (assimilation), mais qui, réciproquement, peuvent agir sur lui (accommodation) et déterminer ainsi totalement ou partiellement son existence et ses modes de vie».

    2. Selon Arnould Clausse, l'environnement, c'est «l'ensemble des réalités matérielles et physiques, conditionné en grande partie par les moyens techniques dont nous disposons ; l'ensemble des réalités sociales et économiques ; l'ensemble des réalités politiques, des réalités morales, intellectuelles, philosophiques, religieuses, esthétiques». Bref, l'environnement, «c’est tout ce qui nous entoure matériellement, intellectuellement, tout ce qui se dit, se passe, se pense, se croit, se fait autour de nous».

    Caractéristiques de l'environnement

    1. L'environnement se caractérise par sa COMPLEXITÉ : milieu de la nature, milieu humain, milieu technique, milieu de la communication.

    2. L'environnement se caractérise également par sa MOUVANCE, par sa MODIFICATION DIMENSIONNELLE.

    Sur le plan spatial, il y a à la fois élargissement et rétrécissement de l'environnement.

    Sur le plan temporel, il y a à la fois contractions et élargissement.

    Sur le plan social, la portée des informations est de plus en plus large et la résonance de plus en plus grande.

    3. Les interconnexions sont plus nombreuses entre certains phénomènes.

    Notre environnement social devient de plus en plus diversifié et complexe. Les hommes prennent de plus en plus conscience de leurs possibilités d'action sur leur environnement physique et social.

    L’enfant et son environnement

    Dès sa naissance, l'enfant possède des réflexes lui permettant une certaine adaptation à son environnement biologique immédiat.

    Il possède aussi des aptitudes sur les plans physiologique et intellectuel lui permettant la découverte et la conquête de son environnement.

    C'est pour partir à la conquête de son environnement proche d'abord qu'il s'essaiera un jour à la marche.

    Pour en conquérir l'aspect plus intellectuel et plus abstrait, l'enfant usera des différents langages. Ses premiers cris, ses gestes intentionnels, ses paroles sont autant de moyens de conquérir ce milieu tantôt physique, tantôt affectif, tantôt social.

    Pour l'enfant, cet être en voie de formation, l'adaptation est une loi fondamentale de vie, où les moteurs de l'action sont accommodation et assimilation actives.

    Par l'intervention de la famille, de la maîtresse maternelle, du maître de notre école fondamentale et des éducateurs de tous les niveaux, notre société a un devoir impérieux : AIDER L’ENFANT, le plus tôt possible à découvrir et à conquérir son environnement.

    « Faire de l'enfant l'adulte que réclame la société d'aujourd'hui et de demain, nous dit Arnould Clausse, c'est lui apprendre et l'aider à conquérir le monde qui l'entoure ».

    Entraîner l’enfant à explorer et à conquérir son environnement

    Qu’est-ce entraîner l’enfant à explorer et à conquérir son environnement ?

    • ENTRAÎNER A L’EXPLOITATION DE L'ENVIRONNEMENT, c'est amener l'enfant à explorer activement et d'une manière aussi réfléchie que son âge le permet, les faits de vie, pour mieux comprendre ce qui s'y passe.
    • ENTRAÎNER A LA CONQUÊTE DE L'ENVIRONNEMENT, c'est exercer l'enfant à aller au-delà du fait d'observation, à se situer en dehors du fait de vie considéré, à en dominer certains éléments, à s'en rendre maître, à les apprécier, à les juger, à se servir de ces réflexions et les transformer en instruments de  compréhension et d'action en fonction des possibilités et des besoins de l'enfant sur le plan psychologique.

    Aujourd'hui, explorer et conquérir son environnement, c'est ADOPTER UNE ATTITUDE CULTURELLE face aux faits de vie de son  environnement. Mais qu'est-ce qu’adopter une attitude culturelle devant un fait de vie ?

    Adopter une attitude culturelle

    Adopter une attitude culturelle, c'est :

    • s'intéresser à un fait de vie dans l'environnement de l'enfant ;
    • se poser des questions, des problèmes au sujet de ce fait de vie ;
    • résoudre ces problèmes, répondre à ces questions et assurer aux élèves une compréhension du fait de vie aussi large et aussi profonde que leur permettent leurs possibilités psychologiques, compréhension nécessitant l'utilisation de connaissances, notions et techniques nouvelles, notions nées dans leur fonction de compréhension du fait de vie, notions qui se veulent réutilisables, transférables, en vue de répondre plus efficacement à des intérêts nouveaux ;
    • faire apprécier ce fait de vie ou certains de ses éléments en vue de permettre à chaque enfant de les interpréter, de se situer par rapport à eux ;
    • rendre aussi enrichissant et éducatif que possible ce contact dynamique avec le fait de vie

    - en construisant et en assimilant des notions ;

    - en conduisant à la maîtrise des techniques ;

    - en élaborant des structures et des synthèses ;

    • entraîner les élèves qui en sont capables

    - à dépasser le fait de vie analysé,

    - à se servir de leurs acquisitions nouvelles pour aller plus loin, agir d'initiative, créer, inventer : dépasser un milieu construit vers un milieu orienté,

    - à transformer ces acquisitions en instruments de compréhension et d'action en vue d'une conquête progressive du monde et d'eux-mêmes.

     

    L’ATTITUDE CULTURELLE

    consiste

    à  O B S E R V E R   pour   C O M P R E N D R E

    à   A P P R E C I E R   et   A S S I M I L E R

    pour  D E P A S S E R

     

     

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  • Introduction - Nécessité - Finalités et objectifs

    Principes essentiels - Compétences...   

    Introduction

    Notre enseignement primaire en Communauté française ne semble pas accorder une part suffisante à l’initiation scientifique. Il importe donc de revoir cette situation. Il faudrait accorder du temps en suffisance aux activités scientifiques.

    L'initiation scientifique apparaît comme une remise en question permanente, au cours de nouvelles expériences, des intuitions communes, de l'acquis personnel, des catégories construites antérieurement.

    Nécessité d'une initiation scientifique

    Un ouvrage, que Georges Henry publia en 1976, a été consacré à une mesure internationale du rendement de l'enseignement des sciences. A l'aide de tests de rendement, d'aptitude et de compréhension des sciences ainsi que par le truchement d'échelles d'attitudes (ex. intérêt pour les sciences), des populations importantes d'élèves âgés de 10 - 11 ans à 15 ans et plus ont été examinées. Il en ressortait des différences de rendement d'un pays à l'autre. Les élèves belges francophones accusaient une faiblesse particulièrement importante.

    Depuis cette constatation, plusieurs professeurs belges spécialistes des sciences et de la pédagogie ont pris conscience de la situation et ont tenté diverses expériences dans le domaine des méthodes d'initiation scientifique.

    Ainsi, dans la plupart de ses ouvrages principaux, Arnould Clausse a montré le caractère changeant de notre environnement. Les connaissances sont souvent très vite remises en question et dépassées. C'est donc davantage le transfert de compétences qu'il faut viser et moins l'acquisition de savoirs purs.

    Une analyse plus récente, effectuée par l’inspection de l’enseignement primaire en 1995, a mis en évidence que la formation scientifique est très peu expérimentale ou pratique dans l’enseignement fondamental en Communauté française. Alors que la pensée des enfants ne peut normalement s’exercer qu’en situation réelle, l’enseignement reste coupé de la réalité, n’utilisant comme support matériel que le papier et le crayon !

    Ce qui est certain, c’est que les programmes mettent l’accent sur le caractère pratique que devrait avoir l’enseignement des matières destinées à éveiller la pensée de l’enfant. Mais il faut bien admettre que les enseignants se réfèrent bien plus souvent à des manuels ou des ouvrages de référence qu’aux programmes !

    Les socles de compétences sont actuellement revus et doivent déboucher sur la réécriture des programmes. Il serait aussi judicieux de s’interroger au sujet des livres, des manuels et des ouvrages auxquels se réfèrent les enseignants.

    La science a fait des découvertes prodigieuses. Certaines de ces découvertes doivent être améliorées. De nombreux exemples pourraient être cités en médecine notamment. Des erreurs, des dangers peuvent et doivent être évités. Nul ne conteste aujourd’hui que la nature doit être protégée. Pour cela, il faut avant tout la comprendre ! Découvrir des phénomènes, c'est les comprendre par l'observation  et l'expérimentation active !

    Les finalités et les objectifs d'une initiation scientifique

    Pourquoi l’éveil scientifique à l'école fondamentale ? L’éveil aux questions scientifiques est prévu à l’école primaire, dès le premier cycle. Toutefois le programme, qui date de 1985 et qui est toujours en vigueur actuellement, précise les finalités de l'initiation scientifique et stipule que l’initiation aux sciences n’a aucune prétention scientifique. L’objectif se limite à stimuler l’intérêt et la curiosité de l’enfant. Le document « Socles de compétences » publié en 1994, précise par ailleurs que l’objectif des socles est d’abord la maîtrise des compétences et non l’accumulation et la mémorisation de connaissances.

    1. L'initiation scientifique est avant tout l'occasion pour l'enfant de pratiquer des démarches qui l'aident à se construire une pensée scientifique.

    2. Elle est l'occasion pour le maître de favoriser une pédagogie de la recherche en donnant à l'enfant les moyens d'apprendre de façon autonome. Le rôle du maître est donc de faire acquérir un savoir plutôt que de le transmettre.

    3. L'initiation scientifique permet de satisfaire le besoin de connaître et de comprendre, d’opérer une prise de recul par rapport au milieu, à l'environnement vécu par l'enfant.

    4. L'initiation scientifique permet de favoriser la maîtrise d'un certain nombre d'outils intellectuels :

    • observer systématiquement
    • vérifier la présence de critères
    • mesurer, comparer, classifier
    • traiter des données en tableaux à double entrée
    • mener une recherche documentaire en utilisant différentes sources d'information
    • organiser une documentation personnelle ou la documentation de la classe
    • pratiquer le dessin
    • schématiser, symboliser pour mieux comprendre et mieux faire comprendre
    • utiliser de mieux en mieux des outils nécessaires à la communication précise et efficace de ses observations, des résultats de recherches
    • acquérir le souci de l'exactitude, de la précision tant dans la Communication orale qu'écrite

    5. L'initiation scientifique donne les moyens d'explorer, de conquérir et de mieux maîtriser son environnement ainsi que le goût d'agir sur son milieu de vie. Les activités de recherche peuvent déboucher sur des réalisations concrètes où les connaissances acquises prennent alors toute leur signification fonctionnelle.

    6. Enfin, l'initiation scientifique permet de faire adopter une attitude responsable vis-à-vis de l'environnement. C'est par elle que l'enfant prendra progressivement conscience des problèmes qui menacent les fragiles équilibres de son environnement et des conséquences que ces problèmes entraînent dans sa vie immédiate.

    C'est pourquoi il est essentiel d'amener l'enfant à intégrer des attitudes qui feront de lui un adulte responsable de la sauvegarde de son milieu naturel et de l'amélioration de la qualité de la vie.

    Retarder l'initiation à la démarche scientifique risque de perpétuer l'état actuel de deux groupes d'individus :

    • la minorité à l'aise face aux phénomènes de la nature, face au développement des technologies nouvelles, face aux problèmes de l'environnement et de la société ;
    • la majorité pour qui tout ceci est incompréhensible.

    Retarder l'initiation à la démarche scientifique, c'est maintenir chez ces derniers individus un sentiment d'impuissance face aux grandes questions de l'heure. Ils ne pourront se prononcer en connaissance de cause et n'auront d'autre choix que de laisser les experts prendre les décisions.

    Quels objectifs poursuivre à l'école fondamentale ?

    • réinstaller la curiosité et y répondre
    • apprendre à poser des questions
    • développer l'attitude critique par la recherche expérimentale
    • développer les sens et l'habileté manuelle
    • faire acquérir des savoir-faire par l'observation, la formulation d'hypothèses, l'expérimentation, la vérification et l'expression des conclusions, c'est développer une attitude scientifique
    • préparer les loisirs actifs
    • rencontrer des valeurs socialement désirables
    • développer le pouvoir d'adaptation

    Les principes essentiels de l’éveil scientifique

    1. L’EVEIL SCIENTIFIQUE PAR  ET  POUR  L’ENVIRONNEMENT

    L'environnement est le point de départ, la source des problèmes et des questions.

    L'environnement élargi est le point de retour obligé.

    2. INTERDISCIPLINARITÉ

    L'éveil de l'être social et l'éveil de la personne, avec son intelligence et son affectivité, ne font qu'un.

    Comme dans les apprentissages extrascolaires, l'expérience enfantine est une.  Il est donc parfaitement inutile de cloisonner l'enseignement en leçons.

    La pensée, comme un tissu de relations, de schèmes interconnectés, tente de donner une solution momentanée à des questions qu'elle pose devant les réalités.

    L'enseignement magistral ne peut guère transmettre une formation authentique. C'est donc un changement de méthode et d'attitude devant l'enfant qui apprend qui est demandé aux maîtres.

    3. Une ATTITUDE CULTURELLE de l'enfant face à son environnement

    L'enfant observe et expérimente pour comprendre les faits de vie dans son environnement. Il apprend à les apprécier et à se situer par rapport à eux, à les dépasser pour aller plus loin, c'est-à-dire à transformer ses acquisitions en instruments de compréhension et d'action en vue d'une conquête progressive du monde et de lui-même.

    Le cadre pédagogique

    Un courant sociologique, qui va de Durkheim à Arnould Clausse, débouche sur la pédagogie par projets.

    Un courant méthodologiste et psychologique, marqué par Paul Osterrieth et Louis Vandevelde, débouche sur une pédagogie par objectifs.

    Ces deux formes de pédagogie ont leur place dans le cadre de la conquête de l'environnement.

    La pédagogie par objectifs est au service de la pédagogie par projets.

    Pour conquérir son environnement, l'enfant, comme l'adulte d'ailleurs, a besoin de l'investiguer avec une attitude critique qui l'entraîne à poser et à se poser des problèmes face à cet environnement.

    L'environnement est le point de départ dans la pédagogie par projets.

    L'enfant a besoin d'observer et d'expérimenter en classe, milieu privilégié, sous la conduite d'un maître-éveilleur (pédagogie par objectifs).

    Mieux armé en savoirs, en pouvoirs, en démarches et en comportements, l'enfant retourne à l'environnement plus élargi.

     

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  • Avant-propos

    Le présent dossier a été élaboré, dans sa première version, entre 1986 et 1987, après avoir assisté à plusieurs séminaires organisés à l'Institut Supérieur de Pédagogie de Bruxelles, entre 1976 et 1982. Ceux-ci ont été animés par Messieurs les Inspecteurs Toussaint PIROTTE, Chris DE GREEF, Claude FURNAL, Jean-Marie HENDRICKX ainsi que par Roger DELDIME, docteur en sciences pédagogiques, qui fut mon professeur de pédagogie en 1964-65.

    Diverses recherches et lectures complémentaires ont été nécessaires.

    J’ai notamment consulté :

    • les Plans d'Etudes de 1922, de 1936 et de 1957
    • le programme de 1975 « Exploration et conquête de l'environnement » (512/8 Ministère de l'Education Nationale)
    • la brochure intitulée « Plan d'éducation pour l'école fondamentale » (512/10 Ministère de l'Education Nationale)
    • la brochure « Éduquer pour le monde de demain » (Ministère de l'Education Nationale)
    • la brochure « L'enfant à la conquête de son environnement » (D/1973/1150/1 Ministère de l'Education Nationale)
    • des articles parus dans les revues « l'Ecole belge » et « Education 2000 » signés F. TIRTIAUX, R. JONET, T. PIROTTE et L. DETIEGE
    • les socles de compétences dans l’enseignement fondamental et au premier degré de l’enseignement secondaire (1994)
    • Matières et programmes (512/15 Ministère de l’Education Nationale – Organisation des Etudes)

    ainsi que les ouvrages cités dans la bibliographie générale.

    En 1987 notre enseignement scientifique apparaissait déjà bien pauvre et m’avait incité à produire un premier document de réflexion pédagogique en faveur d’une initiation scientifique très pratique et impliquant l’activité effective de l’enfant.

    La faiblesse générale qui caractérise toujours notre enseignement des sciences en Belgique et plus particulièrement l’initiation scientifique au niveau de l’école fondamentale a justifié la remise en question de ce travail en septembre 1998 pour tenter d’apporter une aide aux enseignants confrontés chaque jour à des difficultés de plus en plus grandes pour parvenir à intéresser notre jeunesse d’aujourd’hui aux sciences, à l’observation des phénomènes de la nature, de la physique, de la chimie…

     

    André Beauclercq

    Directeur honoraire

     

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