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    Jugement de l'oeuvre de Jean Piaget

    Piaget est à l'intelligence ce que Freud est à l'affectivité. Malgré les apparences, Freud est plus connu que n'est le psychologue de l'intelligence.

    On peut se demander d'où vient cette unanimité à reconnaître en Piaget le plus grand psychologue actuel du développent cognitif.

    C'est probablement pour différentes raisons - l'époque, l'homme, sa façon d'écrire et de publier - qu'il représente actuellement et à lui tout seul la psychologie du développement cognitif.

    L'histoire de la psychologie, course vers la scientificité, explique le périple de Piaget et l'impact de son système.

    Piaget est un auteur difficile. Toute sa vie, i la cherché à savoir comment naissent et s'accroissent nos connaissances, quels sont leurs instruments et comment ils se constituent.

    Les quelques années que Piaget voulait consacrer à l'étude de la pensée enfantine lui prirent plus de cinquante ans ! Grâce à lui, nos connaissances du développement intellectuel des enfants ont fait un bond extraordinaire. La direction prise par l'école de Genève a été déterminante pour une conception du développement qui devait à la fois prendre ses distances par rapport aux théories spéculatives, trouver un terrain d'élaboration plus proche de la complexité de son sujet que ne le permettaient les théories empiristes, dépasser les études descriptives de la psychométrie.

    Sans minimiser l'apport des grands précurseurs (Rousseau, Locke, Binet, Claparède) qui le lui ont permis, c'est indéniablement à Jean Piaget que revient le mérite d'avoir fait naître une science en psychologie génétique, en la dotant d'une théorie si forte qu'elle peut paraître écrasante.

    L'intérêt des premières recherches que Piaget mena sur la pensée enfantine (1920 - 1930) est d'avoir défini, dans un langage descriptif, les aspects les plus apparents de la structure mentale de l'enfant dont l'égocentrisme est la manifestation centrale et d'avoir montré le passage d'une pensée centrée sur le sujet et incommunicable à une pensée socialisée tenant compte de l'interlocuteur.

    Pour Piaget, les étapes successives des comportements observés révèlent directement l'organisation de l'intelligence, la manière dont elle se transforme et le mécanisme de la transformation.

    Sa théorie extrêmement solide rend compte de l'ensemble du développement intellectuel. Elle est très cohérente car les mécanismes et les conditions de transformation supposés sont semblables tout au long de ce développement (déséquilibration - rééquilibration) : au cours de ses interactions avec l milieu, l'enfant rencontre des problèmes que ses moyens cognitifs ne lui permettent pas de résoudre d'emblée. Déséquilibré, l'enfant se rééquilibrera en construisant une structure intellectuelle mieux adaptée. Les acquisitions respectent une succession obligée. L'état terminal de chacun des niveaux est strictement défini et permet donc des discussions non équivoques.

    L'oeuvre de Piaget a exercé, exerce et exercera encore longtemps une influence considérable sur la vie et la pensée scientifique et sur le développement de la psychologie en particulier.

    La théorie de Piaget a suscité et suscite un nombre de travaux expérimentaux. Elle a suggéré la presque totalité des travaux ultérieurs sur le développement cognitif. Elle a pu expliquer la plupart des résultats obtenus. Elle témoigne ainsi d'une très grande capacité d'assimilation, en ce sens qu'elle peut intégrer dans ses structures les structures de nombreux résultats expérimentaux. Cette capacité est sans doute attribuable au caractère essentiel formel de ses hypothèses et de ses conclusions qui leur confère une très grande généralité et les rend compatibles avec un grand nombre de contenus différents.

    Mais la richesse des nuances qui sont attachées à chacune des notions utilisées et l'extrême diversité des constructions complexes obtenues par la composition de ces notions compte aussi pour beaucoup.

    Ces deux facteurs expliquent sans doute la diversité des applications qui peuvent être faites de notions comme celles d'assimilation, d'accommodation, d'équilibre, de structure, de schèmes, d'opérations, d'abstraction, de reconstruction, de décentration...

    Pour ces raisons notamment, la théorie de Piaget a suscité un nombre important de travaux expérimentaux et leur a fourni un cadre notionnel commun pour la formulation de leurs hypothèses et de leurs résultats. On s'y réfère pour construire de meilleurs instruments de mesure du niveau développemental des enfants. Les pédagogues de l'enfance cherchent de plus en plus comment améliorer leur action en s'inspirant des informations de la psychologie génétique.

    Les études interculturelles, menées un peu partout dans le monde, comparent leurs résultats à ceux de l'école genevoise. Les handicaps de toute nature sont réexaminés en fonction du schéma piagétien.

    L'enfant a une activité mentale créatrice, surtout lorsqu'on lui permet de fonctionner librement et qu'on la respecte comme il se doit. Il faudrait créer un monde dans lequel la pensée enfantine serait traitée avec le respect qui lui est due, dans lequel l'enfant saurait qu'il est respecté. Telle est sans doute la bonne manière de lire l'oeuvre de Piaget pour sa valeur éducative, comme le modèle présenté par un homme qui respecte la pensée des enfants.

    La théorie du développement cognitif proposée par Piaget a fait l'objet depuis de nombreuses années d'un vaste courant de recherches chez l'enfant normal. Les études analogues chez l'enfant arriéré restent très rares, surtout en comparaison avec l'abondance des travaux menés dans d'autres domaines comme la discrimination ou la mémoire.

    A l'exception des travaux d'Inhelder en 1963, il faut attendre 1970 pour voir apparaître des travaux suivis et structurés dans l'univers de l'arriération. Parmi les recherches, il faut mentionner deux aspects particulièrement marquants : les caractéristiques du développement cognitif des arriérés et l'utilisation des stades piagétiens à des fins d'évaluation.

    L'introduction des travaux de Piaget dans le domaine de l'arriération mentale est récente. Bon nombre de problèmes restent obscurs ou n'ont même pas encore été abordés, en particulier ceux des implications de la théorie pour l'éducation des arriérés mentaux. Ces lacunes se combleront sans doute progressivement au cours des prochaines années si toutefois les études descriptives sont abandonnées au profit de la découverte des relations existant entre le développement cognitif et l'ensemble des conditions environnementales dans lesquelles évolue l'enfant arriéré mental.

     

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     Pour aller plus loin

    J. M. DOLLE

    POUR COMPRENDRE JEAN PIAGET

    Toulouse, Editions Privat, 1974

    L'ouvrage de référence pour comprendre la pensée et l'œuvre de l'un des pères fondateurs de la psychologie de l'enfant et de la psychologie cognitive.
    L'auteur a complètement revu son texte et a actualisé la bibliographie. Il a également ajouté un chapitre nouveau, détaillant les applications de la pensée de Piaget, pour la pratique clinique de la psychologie cognitive.

     

    Liliane Maury

    PIAGET ET L'ENFANT

    Paris, P.U.F., 1984

     

    R. Droz & M. Rahmy

    LIRE PIAGET

    Bruxelles, Dessart - Mardaga, 1972

     

    G. Cellerier

    PIAGET

    Paris, P.U.F., 1973

     

    Georges Lerbet

    PIAGET

    Paris, Editions universitaires, Psychothèque, 1970

     

    A. Nicolas

    JEAN PIAGET

    Paris, Seghers, 1976

     

    C. Kamii & R. Devries

    LA THÉORIE DE PIAGET ET L'EDUCATION PRÉSCOLAIRE

    Université de Genève, Faculté de Psychologie et des Sciences de l'Education

     

    M. Schwebel & J. Raph

    PIAGET A L'ÉCOLE

    Paris, Editions Denoël - Gonthier, Médiations, 1976

     

    I. Casati & I. Lezine

    LES ÉTAPES DE L'INTELLIGENCE SENSORIMOTRICE

    Paris, C.P.A., 1968

     

    F. Longeot

    LES STADES OPERATOIRES DE PIAGET ET LES FACTEURS DE L'INTELLIGENCE

    Grenoble, Presses universitaires, 1978

     

    M. Deliège & C. Botson

    AU-DELÀ DE PIAGET

    Andenne, Magermans, 1980

     

    M. Reuchlin

    PSYCHOLOGIE

    Paris, P.U.F., 1979

     

    J. C. Bringuier

    CONVERSATIONS LIBRES AVEC JEAN PIAGET

    Editions Robert Laffont, 1977

     

    D. Cohen

    FAUT-IL BRÛLER PIAGET ?

    Editions Retz, 1981


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    Pour en savoir plus au sujet...

     

    1. DE LA MÉTHODE CLINIQUE

    JEAN PIAGET

    La représentation du monde chez l'enfant - Editions Alcan, Paris, 1926

    (2ème édition en 1938 chez le même éditeur ; 3ème édition aux Presses universitaires de France en 1947; 4ème édition en 1972 ; 5ème édition en 1976 ; 6ème édition en 1991. Une nouvelle édition de cet ouvrage est parue dans la collection Quadrige (P.U.F.) en 2003.

    La pensée symbolique et la pensée de l'enfant - Archives de psychologie, tome XVIII, n° 72, mai 1923 pp. 277 - 304

    Le jugement et le raisonnement chez l'enfant - Editions Delachaux et Niestlé, 1947 Note sur la méthode clinique dans l'avant-propos.

    La formation du symbole chez l'enfant - Editions Delachaux et Niestlé, 1945 Note sur la méthode clinique p. 143

    La causalité physique chez l'enfant - Editions Alcan, Paris, 1927, pp. 3 - 4

    Le développement des quantités physiques chez l'enfant - Editions Delachaux, 2ème édition, 1962, Introduction p. XXIV

    Psychologie et épistémologie - Médiations, Paris, 1970

    JEAN PIAGET & A. SZEMINSKA

    La genèse du nombre chez l'enfant, Editions Delachaux et Niestlé, 3ème édition, 1964

    Avant-propos e la première édition, pp. 5 - 6

     

    2. DE L'ÉPISTÉMOLOGIE

    JEAN PIAGET

    Introduction à l'épistémologie génétique - P.U.F., Paris, 1950 - Trois tomes (I. Introduction)

    L'épistémologie génétique - P.U.F., Paris, 1970

    Psychologie et épistémologie - Médiations, Paris, 1970

    Etudes d'épistémologie génétique - P.U.F., Paris, 1957

    Volume I - Épistémologie génétique et recherche psychologique - Programme et méthodes de l'épistémologie génétique - pp. 13 - 84

    Etudes d'épistémologie génétique - P.U.F., Paris, 1962

    Volume XVI - Implications, formalisation et logique naturelle - Défense de l'épistémologie génétique - pp. 165 à 191 -  XVI

    Sous la direction de JEAN PIAGET - Logique et connaissance scientifique, La Pléïade, Paris, 1970

     

    3. DE L'ASSIMILATION ET DE L'ACCOMMODATION

    JEAN PIAGET

    La naissance de l'intelligence chez l'enfant - Editions Delachaux et Niestlé, 4ème édition, 1963

    pp 8 - 14 et 356 - 367

    Etudes d'épistémologie génétique

    Fascicule V : la lecture de l'expérience, pp. 49 - 108 Assimilation et connaissance

     

    4. DES STADES

    JEAN PIAGET

    Problèmes de psychologie génétique - Médiations, Paris, 1972

    Les stades du développement intellectuel de l'enfant et de l'adolescent  pp. 54 - 66

    Psychologie et épistémologie - Médiations, Paris, 1970 - pp. 61 à 79

    JEAN PIAGET & BÄRBEL INHELDER

    La psychologie de l'enfant - P.U.F., Paris, 1966 - pp. 21 - 122

    Entretiens sur le développement psychologique de l'enfant - Editions Delachaux et Niestlé, 1960 - pp. 81 - 92

     

    5. DES ASPECTS OPÉRATIFS ET FIGURATIFS

    JEAN PIAGET

    Les mécanismes perceptifs - P.U.F. Paris, 1961 - pp. 441 - 442

    Etudes d'épistémologie génétique : fascicule XIV p. 169

    Problèmes de psychologie génétique - pp. 78 - 81

     

    6. DE L'ABSTRACTION SIMPLE ET DE L'ABSTRACTION RÉFLÉCHISSANTE

    E. W. BETH & JEAN PIAGET

    in Etudes d'épistémologie génétique

    XIV - pp. 203  217  220 - 221   247 - 248

    JEAN PIAGET

    Logique et connaissance scientifique - Editions Gallimard, 1967 pp. 340 - 393

     

    7. DE LA CONNAISSANCE PHYSIQUE, DE LA CONNAISSANCE LOGICO-MATHÉMATIQUE,

        DE L’EXPÉRIENCE PHYSIQUE ET DE L’EXPÉRIENCE LOGICO-MATHÉMATIQUE

    JEAN PIAGET

    Logique et connaissance scientifique - Editions Gallimard, 1967 - pp. 97 - 102 ; 384 - 395

    Épistémologie mathématique et psychologie - in Etudes d'épistémologie génétique XIV pp. 247 - 255

    Apprentissage et connaissance - in Etudes d'épistémologie génétique VII pp. 24 - 25

     

    8. DE L'ESPACE

    JEAN PIAGETBÄRBEL INHELDER

    La représentation de l'espace chez l'enfant - P.U.F., Paris, 1948

    JEAN PIAGET

    Épistémologie de l'espace - in Etudes d'épistémologie génétique XVII pp. 3 - 13

     

    9. DES FACTEURS DU DÉVELOPPEMENT MENTAL

    FRAISSEPIAGET

    Traité de psychologie expérimentale - P.U.F. Paris, 1963 Tome VII pp. 149 - 153

    JEAN PIAGETBÄRBEL INHELDER

    La psychologie de l'enfant - P.U.F., Paris, 1966 - pp. 121 - 126

    Le développement des quantités physiques - Delachaux, 1961 - pp. XXV - XXVI

     

    10. DE L'INTELLIGENCE SENSORIMOTRICE

    JEAN PIAGET

    La naissance de l'intelligence chez l'enfant - Delachaux et Niestlé, 4ème édition, 1963

    La construction du réel chez l'enfant, Delachaux, 3ème édition, 1963

    La psychologie de l'enfant, P.U.F., 1966

    Le développement de la notion de temps chez l'enfant, P.U.F., 1946 Conclusion pp. 269 - 272

     

    11. DE LA GENÈSE DES OPÉRATIONS CONCRÈTES

    JEAN PIAGET

    La formation du symbole chez l'enfant - Delachaux et Niestlé, 1945

    Psychologie et pédagogie - Médiations, 1969 - pp. 50 - 55

    La naissance de l'intelligence chez l'enfant - Delachaux et Niestlé, 1963

    La psychologie de l'enfant - P.U.F., 1966

    Psychologie de l'intelligence, Editions A. Colin, 1956

    JEAN PIAGET & BÄRBEL INHELDER

    in Traité de psychologie expérimentale de FRAISSE &  PIAGET, P.U.F., Paris, 1963

    Chapitre XXIV, tome VII : Les opérations intellectuelles et leur développement

    BÄRBEL INHELDER - Le diagnostic du raisonnement chez les mentaux - Delachaux et Niestlé, 1963

    JEAN PIAGET & A. SZEMINSKALa genèse du nombre chez l'enfant, Editions Delachaux et Niestlé, 3ème édition, 1964

     

    JEAN PIAGET &  BÄRBEL INHELDER

    La genèse des structures logiques élémentaires - Delachaux et Niestlé, 1959

    De la logique de l'enfant à la logique de l'adolescent - P.U.F., Paris, 1955

    La représentation de l'espace chez l'enfant - P.U.F., Paris, 1948

    JEAN PIAGET et B. GRIZE - Essai de logique opératoire - Dunod, Paris, 1972

     

    12. DE L'INTELLIGENCE OPÉRATOIRE FORMELLE

    JEAN PIAGET &  BÄRBEL INHELDER

    De la logique de l'enfant à la logique de l'adolescent - P.U.F., Paris, 1955

    La psychologie de l'enfant - P.U.F., Paris,1966

    JEAN PIAGET et B. GRIZE - Essai de logique opératoire - Dunod, Paris, 1972

     

    E. BETH & JEAN PIAGET - Épistémologie mathématique et psychologie - P.U.F. , Paris, 1961

    G. G. GRANGER - Pensée formelle et sciences de l'homme - Editions Aubier, 1970

     

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    Les principaux ouvrages écrits par Jean Piaget

    Les lecteurs intéressés par une bibliographie exhaustive des travaux de Jean Piaget, du moins en ce qui concerne ceux qui ont été publiés jusqu'en 1966, la trouveront dans un ouvrage collectif intitulé "Psychologie et épistémologie génétique, thèmes piagétiens" publié à Paris chez Dunod en 1966 à l'occasion du 70ème anniversaire de Jean Piaget.

    Le langage et la pensée chez l'enfant

    Ce livre, dont la première édition date de 1923 (Neufchâtel & Paris, Delachaux & Niestlé) est le tout premier de la longue série d'ouvrages publiés par Jean Piaget. Il a immédiatement suscité l'intérêt - parfois critique - des psychologues du monde entier. Trois quarts de siècle après sa parution, il est toujours aussi actuel et c'est un document précieux pour tous les psychologues et les éducateurs soucieux de connaître les liens qui unissent l'acquisition du langage au développement de la raison.

    Cet ouvrage regroupe toute une série d'observations sur la fonction du langage parlé chez l'enfant de quatre à sept ans. Jean Piaget analyse des échanges verbaux entre enfants d'une part, entre enfants et adultes d'autre part (questions suivies d'explications).

    Piaget recherche les preuves techniques de l'égocentrisme. les résultats obtenus permettent de distinguer plusieurs fonctions du langage, en particulier, les formes plus ou moins évoluées de monologues (langage "égocentrique"), où l'enfant parle à haute voix, mais sans s'adresser à un interlocuteur particulier et sans attendre de réponse et, par ailleurs, diverses formes de "conversations", où les points de vue réciproques sont plus ou mins ordonnés et coordonnés.

    A partir d'observations du langage spontané d'enfants de 4 à 8 ans, l'auteur a saisi le noyau fonctionnel de la connaissance qui sous-tend le langage des petits, l'égocentrisme de leur pensée. C'est cet égocentrisme qui expliquerait la difficulté du jeune enfant à différencier son point de vue propre de celui de son interlocuteur. L'auteur montre également comment, au cours de son développement, l'enfant parvient progressivement à se situer dans la perspective d'autrui et à organiser son discours en fonction de son partenaire.

    D'autres recherches, sur les formes d'interaction sociale à propos d'une situation concrète à expliquer ou de données verbales à transmettre, permettent l'analyse simultanée de la capacité de compréhension de l'enfant et de la capacité de transmettre verbalement un contenu.

    Le jugement et le raisonnement chez l'enfant

    Dans cet ouvrage paru pour la première fois en 1924 (Neuchâtel et paris, Delachaux et Niestlé), Jean Piaget analyse le raisonnement logique chez l'enfant à l'aide de données d'observation et d'expérimentation tirées, soit du langage spontané, soit des réponses obtenues dans la résolution du problème présenté sous forme verbale.

    Piaget analyse le caractère logique de l'égocentrisme et montre que l'enfant ne raisonne pas de la même façon que l'adulte.

    L'auteur met en évidence :

    • d'une part, la compréhension et l'utilisation des relations causales et des connexions logiques sous l'angle de l'emploi des conjonctions grammaticales "parce que", "donc", "alors", "mais"...
    • d'autre part, le raisonnement sur des systèmes de relations (test des trois frères, relation de fraternité, relativité des notions de gauche - droite et des systèmes de classes inclusives ("notion" de patrie : appartenir à un canton, un pays).

    C'est un essai théorique sur le raisonnement chez l'enfant (en particulier les formes prélogiques ou préopératoires).

    Dans la troisième édition de cet ouvrage (Avant-propos, 1947), on trouve une mise au point de Piaget sur la méthode clinique ou "critique" de recherche et ses développements.

    Piaget se préoccupe ensuite davantage des manifestations et surtout des conséquences de l'égocentrisme de l'enfant sur sa représentation du monde et sur sa causalité physique.

    La représentation du monde chez l'enfant

    Dans cet ouvrage paru en 1926 chez Alcan (Paris), Piaget expose d'autres preuves de l'égocentrisme : il montre comment cette représentation du monde chez l'enfant est participationniste, artificialiste, animiste.

    La causalité physique chez l'enfant

    Dans cet ouvrage paru chez Alcan (Paris) en 1927, Piaget démontre en quoi l'égocentrisme empêche l'enfant de relier correctement et logiquement dans le domaine de l'expérience physique un effet à une cause.

    L'ouvrage rassemble les recherches que Jean Piaget a effectuées sur le développement des explications enfantines relatives à des phénomènes physiques naturels et techniques. 

    On y trouve également : 

    • ses conclusions générales sur les notions de réel et de causalité chez l'enfant ;
    • l'explication du mouvement, de la force (propriétés de l'air et du vent, mouvement des corps célestes, la gravité, la flottaison, etc.) et
    • l'explication des effets d'immersion de solides dans un liquide, l'explication des ombres.

    Dans les conclusions, Piaget met les résultats obtenus en relation avec ses recherches antérieures sur les débuts du raisonnement et montre l'étroite liaison entre le développement de la logique et des catégories du réel chez l'enfant. Piaget a qualifié lui-même le contenu de cet ouvrage comme "une erreur de jeunesse" probablement parce qu'on y trouve qu'à l'état de germe les situations de conversation.

     

    Dès 1928, Piaget se met à étudier le problème de l'intelligence motrice.

    La naissance de l'intelligence chez l'enfant

    Paru en 1936 chez Delachaux et Niestlé (Neuchâtel et Paris), cet ouvrage, consacré aux origines et aux premières manifestations de l'intelligence chez l'enfant et aux débuts des fonctions symboliques, se base essentiellement sur un ensemble important d'observations que Piaget a faites sur ses propres enfants. Fidèle à lui-même, il a même provoqué les conduites de l'enfant par des situations appropriées, afin de comprendre, dans la mesure du possible, les mécanismes intérieurs - les schèmes - qui régissent le comportement de l'enfant.

    Cet ouvrage qui est essentiellement centré sur le développement sensorimoteur situe très clairement les étapes successives du développement cognitif de la naissance à l'âge de deux ans environ, et les produits de ce développement au niveau de la genèse de la connaissance et des conduites d'adaptation ou intelligentes.

    L'introduction et les conclusions sont consacrées à un vaste développement sur les problèmes de l'intelligence aux niveaux psychologique et biologique (adaptation) qui conduit à une première formulation de la théorie de l'assimilation. L'analyse des sous-stades du développement sensorimoteur permet de montrer comment l'enfant évolue du niveau des montages héréditaires ("réflexes") à des conduites de mieux en mieux adaptées et intentionnelles ; l'enfant devient finalement capable de s'adapter à des situations inconnues, à enrichir des conduites établies par des variations multiples à résoudre des problèmes simples (intelligence pratique) par des tâtonnements effectifs ou intériorisés.

    Dans l'oeuvre gigantesque de celui que l'on considère souvent comme l'un des plus grands psychologues du 20ème siècle, "La Naissance de l'intelligence chez l'enfant" est, à coup sûr, l'un des livres les plus importants. C'est d'ailleurs lui qui lui apporta la notoriété. C'est là, en effet, qu'il met au point sa théorie « constructiviste », tordant le cou aux deux autres théories dominantes de l'époque : la psychologie de la forme (Gelstat) qui, pour lui, fait la part trop belle à l'inné, et le behaviorisme, qui part du principe que les connaissances s'inscrivent dans le cerveau comme dans une « cire molle ».

    A partir de l'observation de ses trois enfants (Laurent, Lucienne et Jacqueline), qu'il scrute jour après jour pendant les deux premières années de leur vie, Jean Piaget découvre que l'enfant construit ses connaissances par ses propres actions (trouver le mamelon du sein, sucer son pouce, prendre un objet ou le lâcher...). Biologiste de formation, il conçoit l'intelligence comme une fonction qui permet à l'être humain de s'adapter à son environnement. Cette adaptation se fait selon deux processus fondamentaux, l'assimilation et l'accommodation : l'enfant assimile les données du monde qui l'entoure, mais doit, pour ce faire, accommoder ses structures mentales, c'est-à-dire les modifier (et par là même les développer) afin de se réajuster en permanence à son environnement.

    Les processus intellectuels décrits dans cette étude sont ceux de l'intelligence pratique, dite « sensorimotrice », correspondant aux deux premières années de la vie. Mais pour Piaget - et c'est ce qui fait de "La Naissance de l'intelligence chez l'enfant" son oeuvre majeure - ils seront reconstruits par la suite selon le même modèle à des niveaux de plus en plus abstraits. C'est en effet dans cet ouvrage qu'il met au point sa conception des stades : tout être humain passe obligatoirement par certaines périodes bien précises qui se succèdent invariablement. L'intelligence, d'abord sensorimotrice (qui manipule les objets), s'intériorise ensuite et se transforme en une pensée représentative portant d'abord sur les choses concrètes pour devenir enfin formelle, c'est-à-dire pouvant raisonner sur de pures abstractions. Cette modélisation de stades, identique pour chaque individu aux mêmes âges, est cependant aujourd'hui déconstruite par les avancées de la psychologie du développement. Piaget lui-même, à la fin de sa vie, avait d'ailleurs cherché à la nuancer.

    Toujours est-il qu'avec son approche « génétique » (il la qualifie lui-même ainsi) fondée sur la construction-acquisition de la connaissance, Piaget fournissait à la psychologie un cadre théorique de référence - le constructivisme - qui permettait de dépasser l'opposition inné-acquis et allait stimuler bien des recherches. Pourtant, ce n'est que par « par accident » que Piaget se transforma en psychologue d'enfant. Il s'était toujours défini comme épistémologue : ce qui motivait ses recherches était de comprendre comment la connaissance vient aux individus et comment ils la développent. Il pensa alors qu'une des meilleures façons de le trouver était d'observer des enfants dès la naissance afin de comprendre comment, partant de rien, le savoir est progressivement acquis par l'être humain. Et pour lui, l'instrument de cette acquisition était l'intelligence. D'où le titre de cet ouvrage.

    La construction du réel chez l'enfant

    Dans cet ouvrage paru en 1937 chez Delachaux et Niestlé (Neuchâtel et Paris), Jean Piaget étudie les étapes  par lesquelles, au cours des deux premières années, l'enfant parvient à se faire la représentation d'un monde objectif permanent et indépendant de cette représentation elle-même.

    Dans ce livre qui fait suite à la naissance de l'intelligence chez l'enfant, Jean Piaget étudie les étapes par lesquelles, au cours de ses deux premières années, l'enfant parvient à se faire la représentation d'un monde objectif permanent et indépendant de cette représentation elle-même. Cette construction s'effectue par deux mouvements complémentaires : accommodation de la pensée aux choses et assimilation des données nouvelles par l'acquis antérieur. 

    L'auteur met en évidence la complémentarité de deux catégories d'acquisitions : l'organisation de l'intelligence et l'organisation de la réalité qui s'effectuent solidairement et l'une par l'autre. Cette complémentarité résulte de celle qui réunit l'accommodation de la pensée aux choses et l'assimilation des données nouvelles par l'acquis de l'antérieur.

    • Le développement de la "permanence de l'objet" montre que le jeune enfant n'acquiert que progressivement la connaissance que les objets continuent à exister, indépendamment de l'observateur, même s'ils ne sont pas immédiatement perceptibles.
    • Les déplacements dans l'espace deviennent composables et se construisent au niveau de l'action directe en groupe de déplacements (possibilité de faire des détours, de revenir au point de départ par un détour, etc...)
    • L'enfant devient capable de lier ses actions à des effets désirés ; il y a coordination entre les moyens disponibles et les buts visés ; l'enchaînement des actions indique également le début d'une articulation temporelle de l'univers enfantin.

    Ce livre peut être considéré comme un classique de la psychologie de l'enfant.

     

    Les années 40 furent, à tout point de vue, décisives pour Piaget. Alors que cette période a couvert l'Europe de ruines et menacé l'existence de notre culture, Piaget a pu poursuivre, avec sérénité, dans le calme d'un pays heureux et épargné par la tourmente, ses recherches de science pure.

    Les travaux qu'il a produits au cours de ces années représentent l'une des plus belles contributions aux progrès de la psychologie.

    En 1941 sortent simultanément deux ouvrages complémentaires. Réédités à plusieurs reprises et traduits dans différentes langues, ces deux livres comptent certainement pour beaucoup dans le renom de Piaget :

    Le développement des quantités physiques chez l'enfant

    Dans cet ouvrage paru en 1941 chez Delachaux et Niestlé (Neuchâtel et Paris), les auteurs - Jean Piaget et Bärbel Inhelder - entreprennent l'étude du développement des quantités continues ou "extensives" (caractérisées par la comparaison des parties entre elles sans spécification de l'unité) succédant à la notion de quantités logiques ou "intensives" (caractérisées par les simples rapports de parties à tout). Il s'agit d'une analyse de la manière dont l'enfant généralise les notions élémentaires de quantité logique et numérique et les applique aux principales données matérielles qui lui sont accessibles : la quantité de la matière, le poids et le volume physique.

    Ce qui constitue le thème majeur de cet ouvrage, c'est le problème des interactions entre l'activité mentale et l'expérience.

    Dans cet ouvrage dont abordées les notions physiques de poids et de volume, dans un cadre théorique différent de celui de 1927. C'est celui de la conversation. La méthode de Piaget devient plus efficace. Le but poursuivi par Piaget est de chercher à atteindre les secrets d'une pensée en évitant au maximum de la limiter, de la déformer et de l'influencer par la forme des questions posées.

    Le lecteur y trouvera la description des expériences qui ont permis à Piaget de mettre en évidence :

    • les invariances relatives à la déformation d'une boule de pâte à modeler ;
    • les invariances relatives à la dissolution d'un solide (morceau de sucre) dans l'eau ;
    • la dissociation des notions de poids, densité, masse, volume (flottaison des corps, poids d'un corps sur la balance, déplacement du volume d'eau par un solide immergé, etc.) ;
    • les invariances paradoxales : dilatations sous l'effet de la chaleur ;
    • les opérations de sériation d'objets de poids différent. 

    La genèse du nombre chez l'enfant

    Cet ouvrage, paru en 1941 (1ère édition) chez Delachaux et Niestlé (à Neuchâtel et Paris), est un ensemble de recherches sur le développement de la notion de nombre et de concepts reliés à ce concept.

    Piaget a suivi la construction du nombre entier chez l'enfant. Il souligne que cette construction est opératoire, qu'elle s'effectue à partir des groupements de classes et de relations. Il montre que l'acquisition verbale de la numération parlée ne suffit pas.

    Le nombre apparaît comme synthèse des structures de classification et des structures d'ordre, mais il dépasse les deux par sa flexibilité et son degré de généralité supérieurs et obtenus par des abstractions successives.

    On y trouve des recherches sur la notion de l'invariance de quantités (continues et discontinues) physiques lors de la déformation d'un corps ; des analyses des conduites dans des tâches nécessitant des applications bijectives entre éléments (ordonnés ou non) de deux ou plusieurs ensembles ; des comparaisons qualificatives et quantitatives entre ensembles et sous-ensembles (finis), compositions additives et multiplicatives de classes et de relations.

    Comprendre ce livre n'est pas facile : la terminologie utilisée et même les concepts formels dont se servent les auteurs sont à la fois en marge de l'arithmétique classique et des mathématiques structuralistes. Au simple problème de compréhension s'ajoute la nécessité constante de traduire les concepts utilisés en un langage connu par le lecteur !

    Classes, réunions et nombres

    Paru en 1942 aux Editions Vrin à Paris, il s'agit du premier ouvrage à titre logique dans l'oeuvre de Piaget. Il s'agit d'un essaisurles groupements de la logistique et sur la réversibilité de la pensée. C'est aussi une tentative de formalisation des activités caractéristiques du niveau des opérations concrètes.

    Piaget y expose les "groupements", structures logiques isomorphes à la pensée et au raisonnement de l'enfant de 7 - 8 ans à 11 - 12 ans, la structure formelle et la genèse psychologique des groupes arithmétiques.

    Le lecteur y trouvera notamment :

    • une définition du concept "opération" sur le plan formel et sur le plan psychologique ;
    • la distinction entre activités de classification (fonctions propositionnelles saturées par une seule valence) et de sériation (fonctions saturées par au moins deux valences) qui s'articulent soit en systèmes additifs (inclusifs ou linéaires), soit en systèmes multiplicatifs ;
    • la distinction entre opérations simples et secondaires (portant soit sur les compléments de classes, soit sur les relations inverses) ;
    • le développement des huit groupements caractéristiques : (classification ou sériation) X (opérations additives ou multiplicatives) X (opérations simples ou secondaires) et d'un groupement "préliminaire des équivalences pures" ;
    • le passage des groupements logiques aux groupes arithmétiques comme synthèse des structures de classes et de relations, genèse psychologique de la notion de nombre ;
    • la parenté entre les structures logiques développées et la pensée de l'enfant au niveau des opérations concrètes.

    La formation du symbole chez l'enfant

    Cet ouvrage, publié par Delachaux et Niestlé en 1945 à Neuchâtel et Paris, constitue la suite logique de ceux parus en 1936 et 1937 : la reprise des problèmes relatifs à la pensée enfantine de la première période, mais revue au travers des acquisitions de la seconde période.

    Piaget y montre principalement comment l'enfant passe d'une intelligence sensorimotrice, sans langage ni représentation, à une intelligence représentative essentiellement symbolique.

    Piaget analyse le passage de l'intelligence sensorimotrice à la pensée qui s'appuie sur des symboles et des signes, passage crucial pour l'évolution de la raison humaine : les conduites sensorimotrices (action directe) et l'apparition de la représentation et de ses formes de pensée (pensée préconceptuelle, pensée intuitive, égocentrisme intellectuel) ; analyse de l'univers cognitif de l'enfant de 2 à 6 ans.

    C'est à partir d'observations longitudinales sur l'imitation du nourrisson jusqu'à l'imitation intérioriste et imagée de modèles non présents que Piaget retrace la genèse de la représentation.

    A. Origines et évolution de l'imitation ; l'imitation différée comme point de départ de la représentation et des fonctions symboliques ou sémiotiques ; analyse et critique des théories de l'imitation.

    B. Développement du jeu enfantin (jeux d'exercices, jeux symboliques, jeux de règles) ; analyse critique des théories sur le jeu.

    Une analyse fonctionnelle des jeux et des rêves enfantins le conduit à élaborer une conception originale du symbolisme qui s'écarte sur certains points des théories traditionnelles du symbolisme et en particulier de celles des écoles psychanalytiques. La pensée symbolique est décrite comme une pensée reposant surtout sur des images mentales, symboliques, individuelles et pratiquement incommunicables.

    Les notions de mouvement et de vitesse chez l'enfant

    Paru en 1946 aux P.U.F. (Paris), cet ouvrage regroupe les recherches de Jean Piaget relatives aux notions et aux opérations dans les domaines du mouvement (placements successifs, déplacements) et de la vitesse.

    • expériences sur les notions d'ordre et de succession spatio-temporelles ;
    • comparaisons de chemins différents parcourus à la même vitesse, composition des déplacements, analyse de mouvements relatifs ;
    • développement d'une métrique de la vitesse ;
    • conservation des mouvements et des vitesses uniformes, notions d'accélération, etc...

    Le développement de la notion de temps chez l'enfant

    Paru en 1946 aux P.U.F. (Paris), cet ouvrage rassemble les recherches piagétiennes sur les notions et les opérations relatives aux évènements qui se déroulent dans le temps :

    • expériences sur l'écoulement du temps (ordre des évènements ; comparaison de durées successives ou emboîtées) ;
    • études des problèmes de simultanéité, sériations, composition de durées ; mesure du temps, isochronisme d'intervalles temporels successifs, etc...
    • conscience du temps vécu ("temps psychologique"), développement de la notion d'âge.

     

    En pleine guerre mondiale (1942), le Collège de France a invité Jean Piaget à donner une série de leçons sur la psychologie de l'intelligence. Il a accepté. Malgré la déconstruction de la France occupée, Piaget continuait de construire résolument son édifice scientifique, tout comme l'enfant doit, selon lui, construire son intelligence par le choix de ses actions et la prise de distance par rapport au réel.Soixante-dix ans plus tard, la réédition de ces leçons, présentées par Olivier Houdé, permet de constater que, à l'heure des sciences cognitives, certaines fulgurances de Piaget restent d'une étonnante actualité : par exemple, l'idée que les vérités logico-mathématiques sont le produit du cerveau et donc de la pensée en développement chez l'enfant. En une audacieuse remise en cause de l'échelle des sciences d'Auguste Comte, Piaget place non seulement la psychologie de l'intelligence aux fondements des mathématiques et de la logique, mais l'inscrit elle-même dans la biologie, la chimie et la physique.

    Ce changement de point de vue - si original pour l'époque (et qui le reste aujourd'hui) - a donné une place inédite à la psychologie, au cour même du dispositif de la science dite « dure ».

    La seule idée qui intéresse Piaget dans ses ouvrages de logique, c'est la notion de réversibilité car elle permet de parler, d'assimiler l'action à la raison logique. C'est sur cette notion d'assimilation que repose le petit ouvrage théorique qui paraît en 1947 à Paris chez A. Collin :

    La psychologie de l'intelligence

    Cet ouvrage a été écrit d'après les conférences que Piaget a données au Collège de France en 1942 à la demande d'Henri Piéron. Piaget y dresse le bilan des acquisitions concernant les opérations et les théories de l'intelligence.

    L'auteur y fait la synthèse de sa théorie du développement des fonctions cognitives de la naissance à l'adolescence.

    Mais cet ouvrage ne constitue qu'une introduction à la pensée piagétienne. Les grands axes et les grands cadres y sont donnés mais seulement comme des approximations.

    On y trouve une définition de l'intelligence et de son rôle comme fonction d'adaptation, une analyse des théories existantes, des relations entre la logique et la psychologie.

    Piaget développe les relations entre l'intelligence et les conduites sensorimotrices, la perception, les habitudes ; le passage de l'intelligence sensorimotrice à la pensée symbolique et pré-conceptuelle ; la pensée intuitive et les opérations concrètes ; l'achèvement du développement au niveau des opérations formelles.

    La représentation de l'espace chez l'enfant

    Ecrit en collaboration avec Bärbel Inhelder, cet ouvrage date de 1948  et a été publié à Paris aux P.U.F.

    Piaget étudie le développement des mécanismes permettant à l'enfant de contrôler ses actions dans l'espace puis de se représenter des relations spatiales.

    Ses observations et expériences conduisent Piaget à distinguer un espace d'action d'un espace représentatif.

    Les premières propriétés de l'espace que l'enfant peut se représenter et qu'il sait reproduire sont de type topologique (ouverture, fermeture d'une figure géométrique, inclusion, exclusion d'une figure dans une courbe fermée, etc...) et de type ordinal (avant, après sur une figure continue, relation ou propriété, "entre", etc...).

    Ensuite l'enfant passe à la construction d'un espace projectif, dont témoignent, selon Piaget, la compréhension de projections, sections de volumes, développement des surfaces, de volumes, etc...

    Un chapitre important porte sur la mise en relation des perspectives relatives à la perception d'un objet complexe (imaginer un paysage, comme il est  vu d'en face, de gauche ou de droite, etc...).

    La géométrie spontanée chez l'enfant

    Ecrit en collaboration avec B. Inhnelder et A. Szeminska, cet ouvrage (paru aux P.U.F. à Parie en 1948) décrit le développement conduisant à la mesure et à l'analyse quantitative des longueurs, surfaces et volumes. Piaget étudie ensuite l'acquisition des invariants géométriques nécessaires à cette évolution :

    • représentation des déplacements dans l'espace, techniques de mesures spontanées ;
    • conservation des longueurs après décalage de l'objet ; de l'égalité de deux surfaces après soustraction de deux surfaces égales ou après modification de leur forme ; reconstruction de volumes égaux, mais de base différente ;
    • localisation de points dans des espaces à deux et trois dimensions, mesures d'angles et de triangles,etc...
    • partitions, soustractions, compositions, etc... de grandeurs géométriques.

     

    Les investigations de Piaget ont donc porté jusqu'ici tant sur les aspects figuratifs de la connaissance (perception, espace, temps, mouvements, vitesse) que sur les aspects opératifs (nombre, quantités).

    Sa réflexion se formalise en une logique opératoire qui se veut logique de l'action. il la traduit dans l'ouvrage suivant dont l'importance est considérable.

    Traité de logique

    Publié à Paris chez A. Collin, cette "esquisse d'une logique des opérations élémentaires" vise, d'une part, à introduire le débutant (et plus particulièrement le psychologue qui se préoccupe de la genèse des opérations de l'intelligence) au langage formel dont se sert Piaget pour décrire le processus de  la pensée, d'autre part, à développer les thèses piagétiennes sur les structures de la pensée (réversibilité, systèmes d'ensembles).

    L'exposé est (mathématiquement) "naïf" ou "intuitif", c'est-à-dire que les structures logiques développées ne sont pas entièrement axiomatisées (et peut-être même pas entièrement axiomatisables).

    Cet ouvrage est l’un des trois écrits consacrés par Piaget à l’exposé de la "logistique" opératoire construite dans le but de modéliser les conduites et les opérations logiques de la pensée concrète et de la pensée formelle. Son introduction présente les rapports de la logique avec la psychologie et discute le problème de l’objet de la logique.

    Dans cet ouvrage, Piaget formalise les opérations logico-mathématiques concrètes concernant les classes additives et multiplicatives, les relations, les opérations formelles de combinatoire, c'est-à-dire les opérations intrapropositionnelles et les opérations interpropositionnelles.

    Grâce à cette tentative remarquable de catégoriser en termes logiques les opérations effectives de la pensée de l'enfant et de l'adolescent, Piaget va pouvoir se livrer à des investigations plus systématiques sur les classes, les relations, les inclusions et leur quantification.

    Cet ouvrage a soulevé quelques objections de la part des mathématiciens.

    Introduction à l'épistémologie génétique

    Cet important ouvrage (3 volumes, Paris, P.U.F. 1950), modestement intitulé "Introduction" représente la première véritable synthèse des recherches, si diverses en apparence, de Piaget : philosophie de la pensée scientifique, développement de la connaissance chez l'enfant, formalisations des conduites opératoires du sujet, analyse des mécanismes d'adaptation aux niveaux biologique et psychologique, etc...

    Les multiples interactions entre le sujet et l'objet, tant au niveau de l'histoire de la pensée adulte qu'en ce qui concerne la genèse des fonctions cognitives chez l'enfant, conduisent à la formation de connaissances qui s'articulent finalement en sciences, caractérisées par leurs problèmes spécifiques, leurs méthodes particulières, leurs résultats propres.

    Bien qu'autonomes à bien des égards, les divers domaines scientifiques sont liés par une série de connexions, ce qui permet de postuler "un cercle des sciences" allant des sciences formelles (logiques, mathématiques) à la physique, puis à la biologie, aux sciences de l'homme (psychologie et sociologie) pour revenir aux sciences formelles.

    Les trois volumes contiennent l'analyse des grands problèmes de l'épistémologie sous l'angle historico-critique et des apports de la psychologie génétique.

    Quelques-uns de ces problèmes :

    1. Le passage des opérations logico-mathématiques tirées d'une manipulation d'ensembles d'objets aux opérations formelles des mathématiques, rigoureusement déductives et indépendantes du réel (et le dépassant ou préparant une connaissance plus approfondie de celui-ci en fournissant des outils conceptuels mieux appropriés).
    2. Le passage des opérations infralogiques à la géométrie axiomatique et aux modèles abstraits de la physique.
    3. Les problèmes de l'explication en science.
    4. Les tendances d'évolution en sciences.

    La genèse de l'idée de hasard chez l'enfant

    Edité à Paris aux P.U.F., cet ouvrage, coécrit avec B. Inhelder, constitue une analyse du développement des conduites d'enfants dans des situations où le résultat d'un intervention sur le réel est entièrement ou partiellement déterminé par le hasard.

    Les recherches présentées s'inspirent des démonstrations classiques des lois du hasard : tirage au sort, distributions statistiques, mélanges irréversibles, etc...

    Quelques recherches sont consacrées aux combinaisons, permutations, arrangements. 

    De la logique de l'enfant à la logique de l'adolescent

    Le double titre de cet ouvrage coécrit avec B. Inhelder et édité à Paris aux P.U.F., tient à la dualité des problèmes que les auteurs se sont posés. On y trouve les résultats de l'étude génétique de l'induction expérimentale faite par Piaget.

    Ce livre est le reflet de l'ensemble des recherches pour éclairer le passage du raisonnement concret à la pensée formelle et hypothético-déductive, le passage des groupements opératoires au groupe des quatre transformations (I N R C), la combinatoire et la logique des propositions.

    Les situations expérimentales proposées incitent le sujet à tenter de dégager les variables pertinentes et leurs rôles respectifs dans différentes situations plus ou moins complexes.

    Dans cet ouvrage, le lecteur trouvera tous les détails de la constitution de la logique des propositions, combinatoires, induction de lois générales et leur explication, distributions aléatoires et corrélations.

    Chaque chapitre expérimental est accompagné d'une tentative de formalisation des conduites observées. les auteurs présentent des interprétations de la pensée de l'adolescent sur le plan intellectuel.

    Pour analyser les structures opératoires propres à la pensée formelle de l'adolescent, B. Inhelder a eu besoin des algorithmes de la logique des propositions ainsi que du groupe des quatre transformations concernant les inversions et les réciproques.

    Inhelder élabore les instruments d'analyse logistique permettant l'interprétation des résultats obtenus par Piaget.

    les deux buts poursuivis par les auteurs de cet ouvrage sont :

    • la description des différents passages de la logique de l'enfant  à celle de l'adolescent ;
    • la description des structures formelles marquant l'achèvement du développement opératoire de l'intelligence.

    La perception

    A première vue, les travaux de Piaget et de ses nombreux collaborateurs dans le domaine de la perception visuelle portent essentiellement sur les insuffisances des systèmes perceptifs : Piaget étudie les illusions optico-géométriques, les mouvements apparents, les constances perceptives, la perception de la causalité. cependant, cette préoccupation s'insère tout normalement dans les recherches sur l'intelligence et l'épistémologie génétique, puisqu'une théorie de la connaissance ne doit pas seulement se poser la question de la construction du savoir, mais aussi des questions sur la prise d'information par le sujet et les interactions éventuelles entre savoir établi et  information nouvellement acquise.

    Selon Piaget, il semblerait que les déformations dans le champ perceptif soient essentiellement dues à deux grands ensembles de facteurs :

    • les illusions primaires, perceptives qui semblent diminuer avec l'âge. la plupart des illusions "optico-géométriques" font partie de cette catégorie.
    • les illusions secondaires qui augmentent en intensité avec l'âge.

    Cet ouvrage a été publié en 1955 aux P.U.F. à Paris.

    Le problème des stades en psychologie de l'enfant

    Pour Piaget, il ne suffit pas d'ordonner chronologiquement quelques conduites apparemment particulièrement typiques du comportement de l'enfant à un âge donné. il pose un certain nombre de conditions auxquelles la description du développement doit suffire, pour se donner le droit de parler de stades. Il faut :

    1. que la succession des conduites soit constante, indépendamment des accélérations ou des retards qui peuvent modifier les âges chronologiques moyens. On distingue toujours en psychologie l'âge chronologique et l'âge mental en fonction de l'expérience acquise et du milieu social (comme ds aptitudes individuelles) ;
    2. que chaque stade soit défini, non pas par une propriété simplement dominante, mais par une structure d'ensemble caractérisant toutes les conduites nouvelles propres à ce stade ;
    3. que ces structures présentent un processus d'intégration tel que chacune soit préparée parla précédente.

    Il va de soi qu'à ces conditions formelles s'ajoutent des conditions plus pratiques. On ne peut, e effet, pas exiger qu'un stade se présente immédiatement en sa forme la plus évoluée et on distinguera dans la pratique la phase de préparation ou les "processus de formation" et la période d'achèvement ou les "formes d'équilibre finales".

    Piaget dit qu'un stade a atteint son niveau d'équilibre lorsque la structure d'ensemble qui caractérise ce stade a atteint son niveau final, c'est-à-dire que toutes les opérations participant à l'élaboration de celles-ci sont effectivement coordonnées et réversibles, ce qui permet au sujet (dans les limites de la structure d'ensemble typique) de compenser au maximum les perturbations de son univers cognitif. Ce sont pourtant les formes finales d'équilibre qui définissent, à des niveaux différents, les structures d'ensemble qui caractérisent le comportement su sujet. Nous distinguons donc trois stades essentiels du développement intellectuel de l'enfant, à savoir :

    1. le stade du développement sensorimoteur, de la naissance à l'âge de deux ans ;
    2. le stade des opérations concrètes, de 2 ans à 11-12 ans ;
    3. le stade des opérations formelles qui débute vers 11 - 12 ans.

    Cet ouvrage a été publié en 1956 aux P.U.F. à Paris.

    Le genèse des structures logiques élémentaires

    Ecrit en collaboration avec Bärbel Inhelder, cet ouvrage date de 1959  et a été publié à Neuchâtel et Paris par les éditions Delachaux et Niestlé.

    Piaget et Inhelder ont analysé dans cet ouvrage la manière dont les enfants, lors de manipulations d'objets ou d'images, parviennent à les classer ou à les sérier pour trouver les premiers linéaments de leur logique.

    C'est donc l'étude du développement de ces opérations de classification et de sériation (structures d'ordre) portant sur des objets concrets :

    • les premières formes d'articulation de type classificatoire : classifications simples, emboîtement et multiplication des classes, le problème du "tous" et du "quelques" (classes constituées par un nombre fini d'objets concrets), la notion  de complément, réarticulation progressive d'un système de classification en progrès, etc...
    • le développement des conduites de sériation (ordination, ordonnancement) d'objets selon un ou plusieurs critères.

    Les mécanismes perceptifs

    Voici un ouvrage de synthèse qui résume les recherches sur la perception parues entre 1942 et 1964 dans les "Archives de Psychologie" et qui constitue une analyse des relations entre la perception (visuelle) et l'intelligence.

    Y sont successivement décrits :

    • les illusions perceptives et leur évolution en fonction de l'âge ; la perception du temps, de la vitesse, du mouvement et de la causalité ;
    • les activités perceptives, les mouvements oculaires, l'action de l'exercice et de la répétition, l'anisotropie du champ visuel exploré, les activités de mise en relation et d'anticipation, les schématisations ; les transports et transpositions spatiaux et temporels ;
    • les effets de champ et activités perceptives ; les modèles probabilistes des effets de champ, de la loi de Weber, des effets temporels ; la structure des activités perceptives ;
    • les différences, ressemblances, filiations et interactions entre la perception et l'intelligence ; les informations, les notions et les opérations, l'épistémologie de la perception, les aspects figuratifs et opératifs d la connaissance, l'empirisme, l'innéisme et l'interaction entre le sujet et l'objet.

    Cet ouvrage a été publié en 1961 aux P.U.F. à Paris.

    En 1963, Piaget collabore à la publication du

    Traité de psychologie expérimentale (9 volumes - Paris, P. U. F. 1963 à 1965)

    Parmi les neuf volumes de ce traité, les volumes I, VI et VII contiennent quelques mises au point et présentations résumées intéressantes :

    Volume I (Histoire et méthode), Chap. III, p. 121 - 152

    "L'explication en psychologie et le parallélisme psychophysiologique" par Piaget : analyse des formes d'explication en psychologie ; légalité et causalité ; parallélisme psychophysiologique ; relations entre la causalité en sciences et l'implication logique.

    Volume VI (La perception), Chap. XVIII, p. 1 - 57

    "Le développement des perceptions en fonction de l'âge" par Piaget : compte-rendu de l'ensemble des recherches piagétiennes sur les mécanismes perceptifs et leur développement. 

    Volume VII (L'intelligence), Chap. XXIII, p. 65 - 108

    "Les images  mentales" par Jean Piaget et Bärbel Inhelder : exposé résumé du problème de l'image mentale, de ses formes, des expériences sur son évolution, des relations entre l'image, la perception et la pensée. 

    Volume VII (L'intelligence), Chap. XXIV, p. 109 - 155

    "Les opérations intellectuelles et leur développement" par Jean Piaget et Bärbel Inhelder : présentation synthétique de l'ensemble des recherches sur le développement opératoire de l'enfant ; aperçu historico-critique ; les facteurs du développement ; les notions de conservation, opérations de classification et de sériation ; la construction du nombre  entier, les opérations infra-logiques et le hasard ; les opérations formelles.

    Six études de psychologie

    Le progrès de la conduite et de la pensée, la genèse des fonctions logique, perceptive, affective, tels sont les thèmes centraux qu'aborde Jean Piaget dans Six études de psychologie, ouvrage paru en 1964 à Genève, aux éditions Gonthier.

    Cet ouvrage réunit six articles originaux et le texte de conférences de Piaget parus de 1940 à 1964. Il semble tout indiqué pour une première introduction aux méthodes et aux résultats de la psychologie génétique, le style étant assez simple et le vocabulaire peu spécialisé ou technique (d'autant plus qu'il s'agit, en partie, de conférences publiées par la suite).

    La première partie de ce livre retrace l'essentiel des découvertes de Piaget dans le domaine de la psychologie de l'enfant : les étapes du développement mental de l'enfant, de la naissance à l'adolescence.

    Ces premiers articles exposent le développement de la pensée de l'enfant.

    La deuxième est consacrée à une approche de certains problèmes centraux tels que ceux de la pensée, du langage, de l'affectivité, selon une double perspective : génétique et structuraliste. Piaget tend à établir les lois d'une théorie de la connaissance. Les articles approfondissent quelques problèmes plus particuliers : équilibration, innéisme et empirisme, les structures en psychologie génétique, mais aussi des questions de méthode. 

    Écrits pour des spécialistes, les ouvrages de Piaget sont souvent d'une lecture difficile. Le présent volume, à l'inverse, constitue un raccourci saisissant en même temps qu'une introduction complète à l'œuvre de l'éminent psychologue.

    Etudes sociologiques

    Cet ouvrage publié chez Droz à Genève en 1965, est en fait la réimpression de quatre articles sur la sociologie et la socialisation de l'enfant, parus entre 1941 et 1950, augmentée d'une  préface originale.

    Le premier article - "L'explication en sociologie" - est extrait du tome III de l'introduction à l'épistémologie génétique tandis que les trois articles suivants avaient paru dans une collection difficilement disponible. 

    Le fond de ces articles concerne :

    • l'explication en sociologie, en biologie et en psychologie ; les problèmes synchroniques et diachroniques, les rythmes, régulations et groupements ; la formalisation ; la pensée sociocentrique, la coopération ;
    • les échelles de valeur, les valeurs inter-individuelles et collectives, les échanges de valeur, la coordination morale et juridique des valeurs ;
    • le développement opératoire et individuel et le processus de socialisation : dynamique et interactions ;
    • les relations entre les catégories de la morale et du droit.

    Combien de sociologues ont lu les livres de Piaget ? Pourquoi tant d'indifférence et d'incompréhension pour une œuvre qui est parmi les plus notables de notre siècle ? Peut-être parce qu'ils cherchent toujours à se convaincre de leur propre identité professionnelle, et c'est précisément pour l'affirmer et la faire valoir qu'ils plantent et replantent les bornes du domaine et continuent à crier la nature et l'objet de leur science. Or tout un chacun sait que Piaget se moque de ces faux problèmes. En secouant toutes nos vieilles habitudes il nous pousse à fréquenter cette biologie, cette psychologie, cette cybernétique, cette logique qui jusqu'ici n'ont jamais figuré aux programmes de licence en sociologie ou en sciences humaines.

    L'originalité de la sociologie piagétienne consiste surtout dans le fait qu'elle est émergée tout naturellement de la pratique du laboratoire. Etant parti de l'étude de la psychologie de l'enfant, voulant voir plus clair dans les processus de formation du jugement moral, Piaget découvrait l'importance primordiale du jeu dans l'élaboration de la personnalité et de l'organisation sociale au sens le plus fort du mot. Le jeu, en effet, par ses règles, permet de socialiser les individus, de les façonner de manière que chaque conduite individuelle puisse en principe s'adapter aux dynamismes du milieu et des autres. Le fait essentiel de la vie sociale est donc ce système de relations. La société est donc ce tout, cette unité foncière de pensées et d'actions. Entre l'individu et la société, il y a covariance et parallélisme, d'où la nécessité de ne pas séparer l'analyse psychologique de l'analyse sociologique.

    En analysant la fonction des symboles et des symbolismes dans notre vie, Piaget vient également à la rencontre de l'interactionnisme symbolique et donne une base expérimentale à la théorie des rôles telle qu'elle avait été énoncée par Mead, plus ou moins à la même époque, et pose la base de la théorie des rapports entre le caractère et la structure sociale. Ainsi il a mis en lumière les règles régissant les comportements des rôles et a tenté d'expliquer comment du symbole signifiant on arrive aux attitudes.

    Les travaux de Piaget en la matière sont capitaux pour connaître aussi les mécanismes nécessaires à l'acquisition du savoir collectif et à la compréhension des processus de socialisation des représentations. Toute pensée est une prise de conscience des conditions de l'action, elle est une synthèse entre le sujet et l'objet, entre l'homme et l'univers. Les interactions entre ces deux activités consistent "au sens propre en actions se modifiant les unes les autres selon certaines lois d'organisation et d'équilibre". Chacune de ces activités constitue pour Piaget une totalité en elle-même productive de rapports nouveaux, chaque totalité est une structure, où il est donc impossible de séparer la genèse de la transformation, l'équilibre de la fonction, la synchronie de la diachronie. Dans ce sens, Piaget retrouve certaines options de Pareto et de Max Weber. La voie indiquée par Piaget est bien tracée : l'analyse sociologique étudie toutes les actions réelles qui constituent l'infrastructure de la société. Elle étudie également l'idéologie qui est la conceptualisation des conflits et des aspirations nées de l'action. Elle les étudie avec la science sociologique qui prolonge les actions en opérations permettant d'expliquer l'individu et la société.

    Sagesse et illusions de la philosophie

    Edité à Paris aux P.U.F. en 1965, il s'agit d'un ouvrage autobiographique et polémique sur les relations entre la philosophie et les sciences. Piaget y fait l'analyse critique des tendances actuelles de la psychologie philosophique (ou philosophie anthropologique) et la psychologie scientifique et expérimentale.

    L'image mentale chez l'enfant

    Ecrit en collaboration avec avec Bärbel Inhelder, cet ouvrage, paru à Paris aux P.U.F. en 1966, rassemble les expériences et développements théoriques sur l'évolution des images mentales, leur structure et leur fonction dans la pensée du sujet et propose une classification des différents types d'images mentales :

    • les images reproductrices de situations statiques et cinétiques ;
    • les images reproductrices et anticipatrices de transformations de mouvements.

    Piaget y analyse aussi :

    • les relations entre les images reproductrices et l'action autonome du sujet ; les relations entre le développement opératoire et les images mentales ;
    • les relations entre l'image mentale et la perception, l'imitation, les notions préopératoires ; la nature symbolique de l'image, sa signification épistémologique, etc.

    La psychologie de l'enfant

    Exposé synthétique, clair et simple du développement de l'enfant, de la naissance à l’adolescence, cet ouvrage, écrit avec Bärbel Inhelder et paru à Paris aux P.U.F. en 1966, résume un bon nombre de travaux réalisés par Piaget et ses collaborateurs. Il tient compte des faits et points de vue complémentaires exposés par d'autres auteurs.

    Le lecteur y trouvera une bonne synthèse du :

    • développement sensorimoteur sous sous aspect intellectuel et  affectif,
    • développement de la perception et les relations entre l'intelligence et la perception de l'apparition et de l'évolution des différentes fonctions sémiotiques.

    Piaget synthétise également son point de vue à propos :

    • du passage de l'action directe aux opérations intériorisées, réversibles et composables en structure d'ensemble ;
    • du développement des opérations concrètes (opérations et notions relatives aux activités logico-mathématiques (classifications, sériations, nombre) et infra-logiques (invariants physiques, espace, temps, vitesse de mouvement, causalité et hasard) et à propos du développement effectif et la socialisation de l'enfant.

    Suivent les développements caractéristiques au niveau de l'adolescence sur les plans affectif et intellectuel (opérations formelles) et un aperçu des quatre facteurs du développement mental de l'enfant (maturation, hérédité, expériences logico-mathématiques, physiques, interactions, transmissions sociales, équilibration).

    Biologie et connaissance

    Edité à Paris chez Gallimard en 1967, ce grand ouvrage théorique et de synthèse sur la continuité entre les formes d'adaptation biologique et les fonctions cognitives, en tant que modes d'adaptation particulièrement évolués concerne :

    • la problématique, les questions de méthodologie, l'épistémologie de la pensée et de la connaissance biologique (évolution de la vie, des fonctions cognitives, phylogenèse, ontogenèse, psychogenèse ; espèces, systèmes génétiques, individus ; organisme et milieu, sujet et objet ; la causalité biologique) ;
    • les correspondances de fonction et analogies de structures entre les niveaux biologiques d'adaptation et la construction de la connaissance (organisation, adaptation, assimilation et accommodation, conservation et anticipation, régulation et équilibration) ;
    • l'épistémologie des niveaux élémentaires de comportement ; les connaissances innées et instruments héréditaires de connaissance ; les connaissances acquises et expérience physique ; les constructions logico-mathématiques ;
    • les "formes de connaissance en tant qu'organes différenciés de la régulation des échanges fonctionnels avec l'extérieur".

    Le structuralisme

    Publié à Paris aux P.U.F. en 1968, ce petit ouvrage, de caractère essentiellement théorique, présente un "état de la question" en ce qui concerne les tendances structuralistes dans les différentes sciences contemporaines.

    Piaget se limite aux structuralismes propres aux différentes sciences et à quelques mouvements philosophiques inspirés par les structuralismes issus des sciences humaines.

    "Si l'on cherche à définir le structuralisme en opposition avec d'autres attitudes et en insistant sur celles qu'il a pu combattre, on ne trouvera que diversité et contradictions, liées à toutes les péripéties de m'histoire des sciences ou des idées. Par contre, à se centrer sur les caractères positifs de l'idée de structure, on trouve au moins deux aspects communs à tous les structuralismes : d'une part, un idéal ou des espoirs d'intelligibilité intrinsèque, fondés sur le postulat qu'une structure se suffit à elle-même et requiert pas, pour être saisie, le recours à toutes sortes d'éléments étrangers à sa nature ; d'autre part, des réalisations, dans la mesure où l'on est parvenu à atteindre effectivement certaines structures et où leur utilisation met en évidence quelques caractères généraux et apparemment nécessaires qu'elles présentent malgré leurs variétés."

    Son contenu :

    • introduction du problème, caractères pertinents d'une structure, tendances du structuralisme, structures mathématiques et logiques ;
    • structures et structuralisme en physique, biologie, psychologie, linguistique, sociologie et anthropologie culturelle ;
    • la pensée structuraliste en philosophie, le structuralisme comme méthode scientifique.

    Mémoire et intelligence

    Ecrit en collaboration avec Bärbel Inhelder et publié à Paris aux P.U.F. en 1968, cet ouvrage regroupe les recherches sur le souvenir de situations de caractère opératoire chez l'enfant ; les relations entre l'évolution de la mémoire et le développement intellectuel (niveaux opératoire et opératoire).

    L'introduction et les conclusions développent successivement la position du problème dans la perspective de la psychologie génétique, puis tirent les conséquences des observations rapportées.

    Les expériences décrites concernent le souvenir de situations à structure logique (classifications et/ou sériations) additive ou multiplicative, le souvenir des situations présentant une structure causale et le souvenir des dispositions (ou de la structure) spatiales des objets considérés.

    Psychologie et pédagogie

    Que peuvent les méthodes psychologiques nouvelles, en quoi contribuent-elles au renouvellement de la pédagogie ? C'est là le thème central de Jean Piaget dans Psychologie et pédagogie. Qu'il s'agisse de l'affectivité, de l'intelligence, de l'acquisition du savoir, du travail individuel et en équipe, de la discipline, l'auteur indique les grandes lignes de la révolution scolaire qui s'impose. L'école, au cours des siècles, s'est constituée de manière très empirique, et c'est pourquoi, aujourd'hui, elle explose. Ce que propose le présent volume, ce sont les moyens de la reconstruire.

    Edité à Paris chez Denoël et Gonthier en 1969, cet ouvrage réunit deux articles initialement destinés au Tome 15 de l'Encyclopédie Française consacrée à l'éducation et portant sur les grands problèmes de la pédagogie contemporaine.

    La première partie, qui date de 1965, est une remise en question totale de la pédagogie de l'après-guerre.

    La seconde partie est plus ancienne. Elle est centrée sur les découvertes de la psychologie génétique encore peu connues vers 1935. Piaget y montre les implications pédagogiques et établit la liaison entre ces découvertes et les méthodes dites "actives" à cette époque très discutée.

    Ces articles résument et mettent à jour la position de Piaget concernant divers problèmes proprement pédagogiques (évolution des idées pédagogiques, les méthodes d'enseignement, problèmes de didactique, les relations entre la psychologie de l'enfant et la psychologie génétique, les styles pédagogiques, etc...) et un certain nombre de questions touchant plus directement aux questions d'organisation (formation des enseignants, collaboration internationale, réformes de structure et de programme, planification de l'enseignement). 

    Psychologie et épistémologie

    Edité en 1970 à Pris chez Denoël et Gonthier (collection Médiations), ce volume réunit cinq articles parus séparément entre 1947 et 1966, ainsi qu'une introduction originale de Piaget.

    Ces articles concernent, d'une manière générale, l'épistémologie, l'épistémologie génétique, la psychologie génétique et leurs relations et interdépendances. L'introduction peut servir de première initiation aux problèmes de l'épistémologie génétique (buts, méthodes, résultats) et les trois articles suivants comme approfondissements exemplaires des idées développées. Les deux articles finaux sont plus théoriques et concernent des problèmes relativement spéciaux (relations entre la science et la philosophie, classification des sciences sociales).

    Cet ouvrage peut constituer "l'entrée en matière" pour l'épistémologie génétique, sans pour autant apparaître comme un ouvrage simple ou dénué de subtilités.

    La prise de conscience

    Dans cet ouvrage publié à Paris aux P.U.F. en 1974, Piaget cherche à analyser la prise de conscience de l'action propre et en quoi celle-ci est modifiée par une telle intériorisation. Il examine ce que sont les conceptualisations des sujets, y compris les explications causales, lorsqu'elles portent, non plus sur des situations physiques quelconques, mais sur des effets dépendant entièrement des actions de l'enfant et de son intelligence pratique (résoudre des problèmes faciles avec succès précoces). Piaget étudie dans cet ouvrage les situations dans lesquelles la réussite des actions est précoce parce que les coordinations qu'elles supposent résultent de simples différenciations dues aux régulations plus ou moins automatiques d'une démarche globale initiale.

     

    Dans le volume suivant, "Réussir et comprendre", Piaget analyse par contre le cas des réussites plus tardives, par étapes successives dues à des coordinations entre schèmes distincts et à un réglage plus actif supposant en cours de route l'introduction de moyens nouveaux.

    Réussir et comprendre

    Dans cet ouvrage publié à Paris aux P.U.F. en 1974, Jean Piaget vérifie que le caractère cognitif de l'action se maintient antérieurement à la prise de conscience, jusque dans le cas des actions à réussite non précoce mais s'effectuent par étapes et au moyen de coordinations de plus en plus complexes.

    Il étudie ensuite le renversement progressif de cette situation lorsque la conceptualisation rejoint le niveau de l'action et finit, vers 11 - 12 ans, par le dépasser et par influencer en retour les actions jusqu'à pouvoir les diriger en les programmant avant toute réalisation.

    Où va l'éducation ? 

    Cet ouvrage, publié pour la première fois en 1971 à Paris aux Éditions Denoël et Gonthier, puis réédité en 1988 aux Éditions Gallimard 1988, a été rédigé à l'intention de la Commission Internationale sur le développement de l'éducation (organisme dépendant de l'UNESCO).

    La première partie de cet ouvrage est une partie rétrospective destinée à rappeler l'état des problèmes en fonction des tendances récentes de l'éducation.

    On y trouve notamment une analyse critique des "machines à apprendre", des procédures audiovisuelles, des nombres en couleurs de Cuisenaire, des "blocs logiques" de Dienas.

    Piaget y souligne également les grands progrès des recherches psychologiques sur le développement de l'intelligence et des structures cognitives, tout en distinguant les trois courants pédagogiques actuels :

    • l'associationnisme empiriste dans lequel la part de l'enseignant est prépondérante
    • le retour aux facteurs d'innéité et de maturation interne (sous l'influence de Chomsky)
    • le constructivisme piagétien dans lequel l'accent est mis sur les activités de l'enfant. 

    La partie prospective s'intéresse à l'enseignement des sciences qui devrait permettre de faire comprendre à des enfants de niveau primaire certains phénomènes physiques simples au moyen de dispositifs manipulés par l'enfant avec une part maximale de spontanéité et d'activité de recherche.

    La refonte des méthodes et de l'esprit de l'enseignement tout entier met en cause :

    • la didactique spécialisée de chacune des branches de cet enseignement scientifique, mais aussi
    • le rôle de l'enseignement préscolaire,
    • la signification réelle des méthodes actives,
    • l'utilisation des connaissances psychologiques acquises sur le développement de l'enfant,
    • le caractère interdisciplinaire nécessaire des initiations.

    La préparation des maîtres retient également l'attention de Piaget. Il préconise une formation universitaire complète pour les maîtres de tous les niveaux, une union étroite de l'enseignement et de la recherche ; des recherches en équipe dirigées par des représentants de spécialités complémentaires travaillant en constante coopération. 

    La troisième partie de cet ouvrage est un texte datant de 1948, commentant l'article 26 de la Déclaration universelle des Droits de l'Homme, votée par les Nations Unies. C'est évidemment dans l'esprit de la constatation psychologique et sociologique la plus objective que Piaget insiste sur l'urgence des questions soulevées par l'état actuel de l'éducation.

    La plupart des échecs scolaires ont pour cause des méthodes scolaires inefficaces. Ce ne sont pas les matières qu'on leur enseigne que les enfants ne comprennent pas, mais les leçons qu'on leur donne sous forme d'exposés.

    Ce que Piaget préconise, c'est la fin du professeur-conférencier car comprendre, c'est inventer. Toute réforme sérieuse de l'enseignement doit donc commencer par l'information des maîtres qui assurent cet enseignement. Ainsi les méthodes dites actives, l'éducation préscolaire, la recherche interdisciplinaire deviendront autre chose que des mythes. En particulier, ce que préconise, ici, Jean Piaget c'est, avant tout, la fin du professeur conférencier. car comprendre, c'est inventer.

    Pour que l'école devienne plus efficace, les méthodes actives, l'éducation préscolaire et la recherche interdisciplinaire doivent devenir autre chose que des mythes.

    Par conséquent, toute réforme sérieuse de l'enseignement devra commencer par une réforme de la formation des maîtres qui assurent cet enseignement. Le dernier chapitre redéfinit le problème des finalités de l'éducation.

    L'épistémologie génétique

    L'épistémologie génétique explique l'acquisition de la connaissance chez l'enfant comme étant une construction. C'est James Mark Baldwin qui inventa cette expression, qui fut plus tard popularisée par Jean Piaget, directeur du Centre International pour l'Épistémologie Génétique de Genève de 1955 à 1980. Sur la fin de sa vie, Piaget se rattachera au courant constructiviste pour lequel il est une source importante d'inspiration.

    L'épistémologie génétique a, pour son fondateur Jean Piaget, " la double intention de constituer une méthode apte à fournir des contrôles et surtout de remonter aux sources, donc à la genèse même des connaissances, dont l'épistémologie traditionnelle ne connaît que les états supérieurs, autrement dit certaines résultantes. Le propre de l'épistémologie génétique est ainsi de chercher à dégager les racines des diverses variétés de connaissance dès leurs formes les plus élémentaires et de suivre leur développement aux niveaux ultérieurs jusqu'à la pensée scientifique ".

    « La connaissance ne saurait être conçue comme prédéterminée, ni dans les structures internes du sujet, puisqu’elles résultent d’une construction effective et continue, ni dans les caractères préexistants de l’objet, puisqu’ils ne sont connus que grâce à la médiation nécessaire de ces structures et que celles-ci les enrichissent en les encadrant (ne serait-ce qu’en les situant dans l’ensemble des possibles). En d’autres termes, toute connaissance comporte un aspect d’élaboration nouvelle et le grand problème de l’épistémologie est de concilier cette création de nouveautés avec le double faire que, sur le terrain formel, elles s’accompagnent de nécessité sitôt élaborées et que, au plan du réel, elles permettent (et sont même seules à permettre) la conquête de l’objectivité. »

    Publié initialement dans la collection « Que sais-je ? », L’épistémologie génétique pose les linéaments d’une méthode pour appréhender la genèse de la connaissance et suivre les conditions de son développement. Réédité à six reprises, l’ouvrage de Jean Piaget demeure un grand classique de la théorie de la connaissance. 

    Les formes élémentaires de la dialectique

    L'objectif central de cet ouvrage est d'analyser la formation de la dialectique en tant que construction de nouvelles interdépendances constituant l'aspect inférentiel de l'équilibration et procédant par implications entre actions en tant que porteuses de significations.

    Le second but de Piaget est de démystifier la dialectique en sa signification courante. Il suppose que la dialectique constitue l'aspect inférentiel de tout processus d'équilibration tandis que les systèmes équilibrés ne donnent plus lieu qu'à des inférences discursives, d'où une alternance continuelle, à durées variables, entre ces deux phases de construction dialectique et d'exploitation discursive. Toute dialectique comporte des processus circulaires entre des démarches proactives et rétroactives.

    L'étude des caractères classiques de la dialectique, tels que les déplacements, les circularités ou spirales et les relativisations s'insère naturellement dans ce cadre général.

    Jean Piaget est ses nombreux collaborateurs examinent cette notion de "dialectique" et cherchent à montrer qu'on peut observer des processus dialectiques à tous les niveaux de la pensée et même de l'action. 

    Paru en 1980 chez Gallimard, cet ouvrage tente de placer la pensée de Piaget dans la continuation d'une ligne épistémologique qui passe par Hegel et Marx mais qui a débuté bien avant eux.

    Enfin, une autre raison a poussé Piaget à examiner la genèse des formes élémentaires de la dialectique : c'est qu'elles montrent pourquoi la dialectique utilise une variété particulière d'implications : l'implication entre actions ou opérations, qui relie entre elles des transformations pour en engendrer d'autres. L'implication entre actions revient à relier leurs significations qui interviennent dès le savoir-faire sensorimoteur.

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    QUESTIONS ET RÉPONSES

    1. EN QUOI CONSISTE LA MÉTHODE CLINIQUE DE JEAN PIAGET ?

    Les premières grandes recherches de Jean Piaget concernent la pensée logique et mettent en oeuvre une méthodologie originale appelée méthode clinique.

    la méthode clinique de Piaget est une méthode de conversation libre avec l'enfant sur un thème dirigé par l'interrogateur qui suit les réponses de l'enfant, lui demande de justifier ce qu'il dit, d'expliquer, de dire pourquoi, qui lui fait des contre-suggestions.

    L'interrogateur peut ainsi suivre les détours empruntés par la pensée de l'enfant pour le ramener au thème, pour en obtenir des justifications.

    Cette méthode clinique ne s'est pas élaborée d'un seul coup, mais en plusieurs étapes.

    La méthode clinique demeure bien une méthode de libre conversation dirigée sur un thème, mais elle passe d'un "matériel" purement verbal à un "matériel" constitué par des expériences.

    On conserve encore le langage, mais celui-ci ne constitue plus le seul support de l'expérience ; il commence à n'intervenir que pour justifier des actions concrètes réellement effectuées.

    2. COMMENT PIAGET DÉFINIT-IL L'INTELLIGENCE ?

    Le terme d'intelligence est souvent utilisé en psychologie pour rendre compte d'une faculté globale et indépendante des connaissances acquises.

    Cette conception oblige à distinguer d'autres formes d'intelligence plus spécifiques, à côté de cette faculté globale.

    C'est ainsi qu'on parle d'intelligence pratique lorsqu'on donne à résoudre des tâches qui ne font pas intervenir explicitement le langage.

    Piaget définit l'acte intelligent comme la faculté d'adaptation à une situation nouvelle.

    Dans tout acte d'intelligence, il y a deux aspects :

    • la compréhension d'une situation ;
    • l'invention d'une solution qui répond à cette compréhension.

    Nous comprenons une situation selon notre manière de nous y adapter.

    Nous comprenons une situation en la ramenant au savoir déjà acquis correspondant à cette situation.

    ce savoir est toujours structuré, organisé d'une certaine manière à tous les âges.

    Piaget désigne ce savoir par "structures".

    La véritable nature de notre interaction avec le milieu est déterminée par nos structures cognitives.

    Ce que Piaget entend donc par "intelligence", ce sont des actes prouvant notre capacité d'adaptation à des situations nouvelles.

    l'intelligence est donc essentiellement une organisation. Sa fonction est de structurer l'univers comme l'organisme structure le milieu immédiat.

    L'intelligence, moyen d'adaptation, est conçue en termes d'équilibre entre l'assimilation et l'accommodation. le résultat en est la connaissance, moyen que possède l'esprit humain pour s'adapter.

    3. QUELLE EST LA POSITION THÉORIQUE GÉNÉRALE DE PIAGET ?

    La conception piagétienne du développement de l'enfant est constructiviste.

    Cela signifie que les capacités intellectuelles de l'enfant ne se développent pas de façon autonome, au fur et à mesure qu'il avance en âge, pour s'appliquer secondairement sur le milieu extérieur, ni que  l'enfant emmagasine passivement les données injectées par le milieu extérieur.

    Il s'agit d'une interaction continue entre, d'une part, la structure intellectuelle de l'enfant et son action sur le milieu et, d'autre part, les informations (difficultés et succès) qu'il reçoit en retour.

    Chaque action sur le milieu provoque ainsi, en réaction adaptative, une modification intellectuelle qui, à son tour, sera responsable d'une modification de la prochaine action sur le milieu.

    On assiste à un élargissement progressif à la fois des structures intellectuelles et de l'action sur le milieu.

    Donc, entre l'enfant et les informations disponibles, le rôle principal revient à un troisième facteur : les informations tirées de l'action.

    L'enfant s'informe, expérimente le milieu, s'organise.

    une telle conception entraîne l'adhésion aux méthodes dites "actives" par lesquelles on suscite des interactions réelles et variées de l'enfant avec son milieu, interactions qui seront d'autant plus efficaces que l'enfant pourra contrôler et évaluer les effets de ses actions.

    4. EN QUOI CONSISTE LE DÉVELOPPEMENT DE L'INTELLIGENCE ?

    Le développement de l'intelligence est un processus  de construction ininterrompu de la naissance à l'adolescence et dont le déroulement est identique pour tous les enfants de toutes cultures.

    Piaget pense que la connaissance n'est pas reçue de l'extérieur mais que l'enfant la construit de l'intérieur dans un échange permanent avec son milieu.

    Quatre facteurs sont nécessaires au développement :

    • la maturation nerveuse
    • l'exercice et l'expérience acquise dans l'action effectuée sur les objets
    • les interactions et les transmissions sociales
    • l'équilibration 

    5. QU'ENTEND-ON PAR "ADAPTATION" ?

    L'adaptation est un équilibre entre l'organisme et le milieu.

    On dit qu'il y a adaptation lorsque l'organisme se transforme en fonction du milieu et que cette variation a pour effet un accroissement des échanges entre le milieu et lui, favorables à sa conservation.

    L'adaptation intellectuelle est une mise en équilibre progressive entre un mécanisme assimilateur et une accommodation complémentaire.

    L'adaptation n'est achevée que lorsqu'elle aboutit à un système stable, c'est-à-dire lorsqu'il y a équilibre entre l'assimilation et l'accommodation.

    L'adaptation caractérise un équilibre qui se réalise par structurations successives entre deux processus : l'assimilation et l'accommodation. Lorsque celles-ci sont en équilibre, la conduite est adaptée.

    6. QUELLE DISTINCTION PIAGET FAIT-IL ENTRE "ASSIMILATION" et "ACCOMMODATION" ?

    Pour Piaget, toute conduite est une adaptation. Toute adaptation est un rétablissement de l'équilibre préalablement rompu entre l'organisme et le milieu. Toute activité implique un déséquilibre momentané et le retour à l'équilibre se marque par un sentiment provisoire de satisfaction. Assimilation et accommodation sont les deux pôles de l'adaptation.

    Du point de vue cognitif, l'assimilation est perceptive et sensorimotrice. L'objet est perçu relativement aux schèmes antérieurs, c'est-à-dire à l'ensemble des opérations mentales dont le sujet dispose. L'accommodation est le résultat des pressions exercées par le milieu extérieur.

    Du point de vue affectif, l'assimilation se confond avec l'intérêt. L'accommodation se confond avec l'intérêt pour l'objet nouveau.

    En d'autres termes, l'assimilation consiste à incorporer un objet ou une situation à un schème. L'accommodation consiste à modifier le schème en fonction des propriétés de l'objet qui empêchent le jeu de l'assimilation.

    Toute activité spontanée consiste donc à assimiler d'abord, à accommoder ensuite.

    L'adaptation se réalise lorsque l'assimilation et l'accommodation s'équilibrent. L'adaptation est donc un équilibre entre l'assimilation et l'accommodation.

    En d'autres termes encore :

    Toute action comporte les deux pôles de l'activité intelligente : assimilation et accommodation.

    L'assimilation peut consister tout simplement à incorporer une situation ou un objet à un schème ou à un ensemble de schèmes coordonnés. cette activité est simplement une répétition d'actions ; mais, en même temps, elle fixe ou consolide les schèmes. C'est l'assimilation reproductrice. Elle peut également discriminer, dans le contexte d'une activité, des significations, et donc les assimiler à des schèmes. C'est alors l'assimilation récognitive. Enfin, elle peut étendre le champ des schèmes d'action à des secteurs non encore rencontrés : c'est l'assimilation généralisatrice.

    Quant à l'accommodation, elle consiste à différencier de plus en plus finement les schèmes d'actions pour mieux les adapter aux conditions changeantes du champ d’activité autant qu'à contribuer à créer des schèmes nouveaux.

    En conclusion : l'ASSIMILATION consiste à incorporer un objet ou une situation à un schème ; l'ACCOMMODATION consiste à modifier le schème en fonction des propriétés de l'objet qui empêchent le jeu de l'assimilation. L'ADAPTATION se réalise lorsque l'ASSIMILATION et l'ACCOMMODATION s'équilibrent.

    7. QU'EST-CE QUI CARACTÉRISE L'INTELLIGENCE DE L'ENFANT AVANT L'APPARITION DU LANGAGE ?

    Avant l’apparition du langage, l'intelligence de l'enfant est une intelligence sans pensée et sans représentation. C'est l'intelligence sensorimotrice.

    Au cours de cette période sensorimotrice (de la naissance à l'âge de 2 ans environ), s'élaborent les structures logiques fondamentales de toute activité. Celles-ci se reconstitueront aux étapes ultérieures mais à des niveaux supérieurs et avec des moyens nouveaux.

    Elle met aussi en évidence comment le sujet se constitue tout en constituant le monde qui l'entoure.

    8. QU'EST-CE QUE L’EXPÉRIENCE ?

    Quand il parle d' "expérience", Piaget distingue en fait

    • ce qui relève de l'objet

    et

    • ce qui provient des activités du sujet, en particulier d'activités pouvant se détacher des objets concrets jusqu'à fonctionner symboliquement à l'état d'opérations purement déductives.

    Piaget distingue donc deux types d'expériences ou deux composantes dans toute expérience.

    D'une part, l'expérience physique qui consiste à agir sur les objets pour découvrir leurs propriétés en les tirant d'eux par une abstraction simple à partir des informations perceptives auxquelles elles donnent lieu.

    Exemple : découvrir que le poids des objets est indépendant des formes et des couleurs.

    D'autre part, l'expérience logico-mathématique, nécessaire au jeune enfant à un niveau où il n'est pas encore capable d'opérations ni de déduction réglée, consiste à agir sur les objets. Elle tire son information des propriétés que les actions introduisent dans les objets.

    Exemple : découvrir par manipulations que deux objets réunis à trois autres donnent le même résultat que les trois derniers objets réunis aux deux premiers.

    Conclusion : expérience physique et expérience logico-mathématique sont donc indissociables.

    9. QU'EST-CE QUE L'ABSTRACTION ?

    D'une façon générale, les notions sont abstraites, no n des objets perçus, mais surtout des actions exercées sur eux et de la coordination  de ces actions.

       I. L'expérience acquise au cours de l'action sur les objets présent pour Piaget deux composantes :

    1) l'expérience physique, qui consiste à agir sur les objets pour découvrir leurs propriétés.

    C'est par une ABSTRACTION SIMPLE que l'enfant découvre que les objets ont un poids, propriété qui se distingue de leur volume, de leur forme ou de leur couleur.

    2) l'expérience logico-mathématique, qui porte sur les propriétés des actions coordonnées.

    En comptant de gauche à droite les cailloux alignés, l'enfant de 5 - 6 ans découvre qu'il obtient le même la même somme en les comptant de droite à gauche. cette propriété appartient à la coordination des deux dénombrements effectués en sens inverse. A ce propos, Piaget parle d'ABSTRACTION RÉFLÉCHISSANTE. Elle informe l'enfant du résultat de ses actions lui permettant d'établir un ensemble de règles et de prévoir les conséquences de ses actions ultérieures.

     

    Les opérations se construisent de façon continuelle par l'abstraction réfléchissante qui réfléchit sur le plan supérieur la structure élémentaire initiale, la reconstruit et l'élargit.

    Les abstractions réfléchissantes consistent à transformer les objets ou les situations. Elles ne s'exercent qu'à l'occasion de problèmes, de conflits, de déséquilibres.

    La reconstruction opérée consiste à rétablir l'équilibre antérieur en élargissant le champ de l'équilibre par une modification des structures.

     

     II. Piaget distingue encore un autre niveau d'abstraction nécessaire à l'apparition du raisonnement logique : c'est l'ABSTRACTION EMPIRIQUE. L'enfant agit en fonction de différences ou de ressemblances entre les objets. Il considère les caractéristiques pertinentes pour une tâche donnée.

    Lorsque ces règles auront été organisées en structures d'ensemble régissant les raisonnements et les prévisions dans toutes les situations logiques élémentaires, l'enfant aura atteint le stade opératoire concret.

     

    III. Piaget distingue aussi :

    •  l'ABSTRACTION DU CONCRET

    L'enfant applique les raisonnements à des énoncés présentés sous formes symboliques. Il en est alors au stade opératoire formel.

    • l'ABSTRACTION RÉFLÉCHIE

    L'enfant apprend à décrire et à connaître ses propres actions et démarches. C'est la prise de conscience.

    10. QU'EST-CE QUE L'ÉGOCENTRISME DE LA PENSÉE ?

    L’ÉGOCENTRISME est la manifestation d'une pensée centrée sur elle-même.

    Elle n'est pas socialisée, en ce sens qu'elle ne peut pas encore se fonder sur la réciprocité des points de vue, ce qui impliquerait, au niveau des conduites sociales, la coopération.

    Une telle pensée est essentiellement symbolique, prélogique.

    A partir de 3 - 4 ans apparaît donc une certaine forme de pensée différente de celle de l'adulte, la pensée symbolique, dont l'égocentrisme intellectuel est un des caractères essentiels. Ce qui lui manque, du point de vue logique, c'st la réversibilité.

    Après 7 ans, la réversibilité logique est généralement acquise. on assiste alors à des modifications radicales des conduites intellectuelles, sociales... dans le sens de la réciprocité et de la coopération et à une diminution progressive et relativement rapide de la pensée symbolique.

    La décentration nécessaire pour l'accès à une pensée socialisée s'effectue lorsqu'une modification de structure de la pensée s’opérera. La réversibilité en est l'indicateur.

    11. QU'EST-CE QU'UNE OPÉRATION ?

    Une opération se définit comme une action intériorisée ou intériorisable, réversible et coordonnée en une structure totale avec d'autres opérations.

    Une action intériorisée est une action exécutée en pensée sur des objets symboliques, sot par représentation de son déroulement possible et son application à des objets réels évoqués par images mentales.

    12. POURQUOI PEUT-ON DIRE QUE L'ADDITION EST UNE OPÉRATION ?

    L'addition est une opération puisqu'elle comporte une inverse, la soustraction, et parce que le système des additions et soustractions comporte des lois de totalité.

    Réversible doit être compris au sens de pouvant se dérouler dans les deux sens et, par conséquent, de comportant la possibilité d'une action inverse qui annule le résultat de la première.

    13. QU'ENTEND-ON PAR "RÉVERSIBILITÉ" ?

    Pendant la phase d'achèvement des groupements d'opérations concrètes, la réversibilité se présente sous deux formes :

    • la première qui correspond à la logique des classes, l'arithmétique, est l'inverse ou négation ;
    • la seconde est la réciprocité et apparaît dans les opérations de relations.

    Mais ces deux formes de réversibilité ne sont pas coordonnées entre elles en un système unique. D'où la limitation de la pensée opératoire concrète !

    14. QUELLE DIFFÉRENCE Y A-T-IL ENTRE "OPÉRATIF" et "OPÉRATOIRE" ?

    Le terme "opératif" n'est pas à confondre avec le terme "opératoire".

    En effet, ce qui est figuratif et opératif dans la connaissance, c'est l'aspect ou encore la manière d'appréhender le réel.

    Ces deux termes désignent donc le mode d'appréhension du réel, alors que le terme "opératoire" désigne le mécanisme d'appréhension.

    Ce qui est figuratif, c'est tout ce qui concerne les états.

    15. QUELLE DIFFÉRENCE Y A-T-IL ENTRE LES ASPECTS FIGURATIFS ET LES ASPECTS OPÉRATIFS ?

    La REPRÉSENTATION ou vie représentative, après l'âge de 2 ans, comporte deux aspects différents.

    Le premier, ASPECT FIGURATIF DE LA PENSÉE, est tout ce qui se rapporte aux configurations ou états.

    Guidé par la perception et soutenu par l'image mentale, l'aspect figuratif de la représentation joue un rôle prépondérant dans la pensée préopératoire de l'enfant de 2 à 7 ans.

    Dans l'aspect figuratif de la pensée interviennent donc la perception, l'imitation gestuelle, phonique, graphique, et l'image mentale.

    Le second, ASPECT OPÉRATIF DE LA PENSÉE, est relatif aux transformations et se rapporte à tout ce qui modifie l'objet à partir de l'action jusqu'aux opérations.

    Dans l'aspect opératif de la pensée, on rencontre les actions sensorimotrices sans imitation, les actions intériorisées décelables dans les divers tâtonnements au niveau préopératoire, les opérations ou actions intériorisées, réversibles et se coordonnant en structures d'ensemble de transformations.

    Ce qui est figuratif et opératif dans la connaissance, c'est la MANIÈRE d’APPRÉHENDER LE RÉEL. Ces deux termes désignent donc le mode d'appréhension du réel. Il ne faut pas les confondre avec le terme "opératoire" qui désigne le mécanisme d'appréhension.

    16. QU'ENTEND-ON PAR "ÉQUILIBRE" ?

    L'équilibre se définit par la réversibilité.

    Chaque palier d'équilibre ou stade d'achèvement constitue un stade de préparation pour le stade ou palier d'équilibre suivant.

    La notion d'équilibre implique celle de réversibilité et le développement intellectuel implique celle d'équilibre de plus en plus stable à quoi correspond une réversibilité de plus en plus mobile.

    L'équilibre est essentiellement mobile car solidaire d'une structure d'ensemble ayant ses lois de totalité et qui se maintient en tant que telle.

    Une structure en équilibre est une structure capable de compensations mais c'est aussi une structure ouverte, capable de s'adapter aux conditions changeantes du milieu.

    17. COMMENT LA CONNAISSANCE S’ÉLABORE-T-ELLE ?

    Les structures de la connaissance procèdent des actions.

    Du niveau sensorimoteur au niveau opératoire formel, on assiste à des restructurations par paliers successifs.

    Les actions commencent par porter sur des objets physiques eux-mêmes et s'exercent dans un contexte que Piaget qualifie globalement d' "expérience".

    18. COMMENT S’ÉLABORENT LES NOUVELLES STRUCTURES OPÉRATOIRES ?

    Les démarches de l'intelligence sont ordonnées.

    Les opérations qui dirigent ces démarches sont ordonnées.

    Et si les opérations sont ordonnées, c'est parce qu'elles dérivent d'actions déjà ordonnées qui dépendant à leur tour de mécanismes nerveux ou biologiques impliquant dès le départ des relations d'ordre.

    On observe donc une reconstruction palier par palier, de plus en plus large, de l'ordre initial par l'effet d'abstractions réfléchissantes généralisant à chaque nouveau palier les éléments tirés du palier précédent.

    A chaque nouveau palier du développement mental, les nouvelles structures opératoires s'élaborent grâce à un double processus d'abstraction réfléchissante et de construction puisque l'abstraction réfléchissante est à la fois abstraction à partir du plan antérieur et reconstruction élargie ou enrichie sur le plan nouveau.

    19. QU'EST-CE QU'UN SCHÈME ?

    Un schème est ce qu'il y a de plus généralisable dans une action et de plus transposable comme tel d'une action à l'autre.

    Il est par conséquent le cadre dans lequel un grand nombre d'actions s'inscrivent. Un schème est la structure d'une action.

    Le schème est, en un premier sens, un cadre d'assimilation d'un ensemble d'actions de même caractère.

    20. QU'EST-CE QU'UN SCHÈME D'ACTION ?

    un schème d'action, c'est ce qui, dans une action, est transposable, généralisable ou différentiable d'une situation à la suivante.

    C'est ce qu'il y a de commun aux diverses répétitions ou applications de la même action.

    C'est le produit de la reproduction active d'actions de tous genres, de la conduite sensorimotrice à l'opération intériorisée, qu'il s'agisse d'actions simples (ex. le schème de la préhension) ou de coordinations entre actions (ex. le schème de la réunion ou de la sériation).

    21. QU'EST-CE QU'UN SCHÈME D'ORDRE ?

    Un schème d'ordre, c'est ce qui est transposable, généralisable d'une situation de rangement à la suivante.

    Exemples :

    • utiliser certains moyens avant d'atteindre un but ;
    • ranger des plots par ordre de grandeur ;
    • construire une série mathématique.

    22. QU'EST-CE QU'UN SCHÈME SENSORIMOTEUR ?

    La notion de schème joue un rôle important dans  la psychologie génétique piagétienne.

    Les schèmes sensorimoteurs, ce sont les organisations sensorimotrices susceptibles d'application à un ensemble de situations analogues et témoignant ainsi d'assimilations reproductrices.

    Dans chaque secteur de l'activité de l'intelligence on rencontre des schèmes. Les schèmes sensorimoteurs se réélaborent sur le plan de la représentation en schèmes progressivement opératoires.

    Il y a toutefois des schèmes à la fois plus larges et plus différenciés selon les secteurs de l'activité : schèmes symboliques, intuitifs, schèmes opératoires concrets, schèmes opératoires formels. 

    23. QU'ENTEND-ON PAR "EXTENSION ET COMPRÉHENSION D'UN SCHÈME" ?

    Du point de vue structural, la logique sensorimotrice repose sur le schème qui en constitue l'unité.

    Le schème est un instrument de compréhension mais sans pensée, sans représentation. C'est donc un concept pratique.

    L'extension d'un schème, c'est l'ensemble des situations auxquelles il s'applique (ex. le schème de "prendre" peut être appliqué indifféremment au biberon, au hochet, à la ficelle, au drap, ...)

    La compréhension du schème, c'est l'ensemble des propriétés communes aux situations semblables : le schème de "prendre" s'applique à tout objet saisissable.

    24. QU'EST-CE QUE LA FONCTION SYMBOLIQUE OU SÉMIOTIQUE ?

    La fonction symbolique ou sémiotique est un mécanisme commun aux différents systèmes de représentations.

    La fonction symbolique permet de représenter les objets ou évènements non actuellement perceptibles en les évoquant par le moyen de symboles ou de signes différenciés.

    la fonction symbolique est donc la capacité d'évoquer des objets ou situations non perçues actuellement en se servant de signes ou de symboles.

    La capacité évocatrice, c'est la fonction symbolique. Les moyens, ce sont le langage, l'imitation différée, l'image mentale, le dessin, le jeu symbolique.

    25. QUELLES DIFFÉRENCES PIAGET FAIT-IL ENTRE L'INTELLIGENCE SENSORIMOTRICE ET L'INTELLIGENCE OPÉRATOIRE CONCRÈTE ?

    L'intelligence sensorimotrice (de 0 à 2 ans) est une intelligence sans pensée ou représentation, sans langage, sans concepts. Il lui manque la fonction symbolique qui lui permettrait de se représenter par un ensemble d'images mentales les objets et les situations absents et de les évoquer par le langage.

    C'est donc une intelligence qui se détermine en présence de l'objet, des situations, des personnes et dont l'instrument est la perception. Cette intelligence, dont le développement est extraordinairement rapide, élabore, à ce niveau, les structures cognitives de l'intelligence ultérieure. L'intelligence sensorimotrice est donc essentiellement pratique.

    le passage de l'intelligence sensorimotrice à l'intelligence représentative ne s'effectue pas par un e brusque mutation, mais par des transformations lentes et successives.

    Pour cela,il faut que l'enfant reconstruise l'objet,l'espace, le temps, les catégories logiques de classes et de relations au plan de la représentation. Cette longue reconstruction s'étend de l'âge de 2 ans à l'âge de 11 - 12 ans.

    Deux étapes caractérisent cette ré-élaboration représentative.

    Dans la première (de 2 à 7 - 8 ans environ) domine la représentation symbolique : l'enfant voit mentalement ce qu'il évoque. Son esprit est le siège d'images. L'égocentrisme est alors la forme dominante que prend la pensée de l'enfant au cours de cette période.

    Dans la seconde étape (de 7 - 8 ans  à 11 - 12 ans), avec la réversibilité acquise, les opérations de classification et de sériation qui s'élaborent pendant que se constituent les invariants de substance, poids et volume notamment, permettent de penser de façon plus mobile la réalité concrète.

    Cette intelligence n'opère que sur le concret sans la possibilité d'envisager des hypothèses et de se déterminer selon le plus probable.

    L'intelligence opératoire concrète consiste donc à classer, sérier, dénombrer les objets et leurs propriétés dans le contexte d'une relation du sujet à l'objet concret directe et sans la possibilité de raisonner sur de simples hypothèses. 

    26. QU'EST-CE QU'UN STADE ?

    Dans le développement des structures de l'intelligence, on discerne un ensemble d'étapes caractéristiques, appelés STADES, que l'on peut ramener à quatre principaux  :

    • le stade de l'intelligence sensorimotrice (jusqu'à 2 ans) ;
    • le stade de l'intelligence symbolique ou pré-opératoire (de 2 à 7 - 8 ans) ;
    • le stade de l'intelligence opératoire concrète (de 7 - 8 à 11 - 12 ans) ;
    • le stade de l'intelligence opératoire formelle (à partir de 12 ans, avec palier d'équilibre vers 14 - 15 ans).

    Cette division en stades n'est pas arbitraire : elle correspond à des critères définis, contrairement aux stades des autres écoles psychologiques (Freud, Wallon, Gesell) ou d'autres perspectives de développement (physiologique, poids, taille,...)

    L'ordre de succession des acquisitions doit être constant : un caractère n'apparaîtra pas avant un autre chez un ensemble de sujets et après chez un autre ensemble.

    Les stades ont un caractère intégratif, ce qui signifie que les structures construites à un niveau donné sont intégrées dans les structures au niveau suivant.

    Exemples : les structures sensorimotrices sont partie intégrante des structures opératoires concrètes ; celles-ci le son t à leur tour des opérations formelles.

    Chaque stade doit se caractériser par une structure d'ensemble.

    Exemple : une structure au niveau des opérations concrètes : un groupement : le groupement additif des classes comprendra

    • une opération directe
    • une opération inverse
    • une opération associative
    • une opération identique

    Chaque stade comporte à la fois un niveau de préparation et un niveau d'achèvement.

    La notion de décalage est de nature à faire obstacle à la généralisation des stades. Un décalage est la répétition ou la reproduction du même processus formateur à des âges différents.

    Les décalages horizontaux se rencontrent quand une même opération s'applique à des contenus différents.

    Exemple : un enfant de 7 - 8 ans sait sérier, classer, dénombrer des quantités de matière, de longueur et parvient à des notions de conservation relatives à ces mêmes contenus, alors qu'il est incapable de ces mêmes opérations pour ce qui concerne le poids. deux ans plus tard, il y parviendra, mais pas pour le volume. 

    27. QUELLE DIFFÉRENCE Y A-T-IL ENTRE "OPÉRATION LOGIQUE" ET "OPÉRATION INFRA-LOGIQUE" ?

    Les opérations qui se constituent aux alentours de 7 - 8 ans sont de deux ordres :

    • les opérations logico-mathématiques
    • les opérations infra-logiques.

    Les opérations logico-mathématiques et les opérations infra-logiques (physiques ou spatio-temporelles) sont, avant l'âge de 7 - 8 ans, confondues, toutes les opérations étant, en leurs stades élémentaires, à la fois logiques et physiques.

    Les opérations concrètes de caractère logico-mathématique portent exclusivement sur les ressemblances (classes et relations symétriques), les différences (relations asymétriques) ou les deux à la fois (nombres), entre objets discrets, réunis en ensembles discontinus et indépendants de leur configuration spatio-temporelle.

    Les opérations concrètes de caractère infra-logique (physiques ou spatio-temporelles) signifient qu'elles son constitutives de l'espace. Ce terme infra-logique signifie que les opérations sont formatrices de la notion de l'objet comme tel, par opposition aux ensembles d'objets. 

    Les opérations infra-logiques portent sur les emboîtements de parties d'un même objet, la différence d'ordre ou de placement, de mesure.

    Constitutives des objets comme tels, les opérations infra-logiques concernent les conservations physiques (des quantités de matière, de poids, de volume) et la constitution de l'espace (avec conservations correspondantes de droites, surfaces, périmètres, horizontales, verticales).

    Les opérations constitutives de l'espace ont la particularité d'être accompagnées d'images mentales relativement adéquates (l'image d'un carré est à peu près un carré) et de pouvoir se traduire par des représentations figurées au contraire des opérations logico-mathématiques.

    28. QUELS SONT LES 4 FACTEURS DU DÉVELOPPEMENT MENTAL SELON PIAGET ?

           QUEL EST LE FACTEUR LE PLUS IMPORTANT ET POURQUOI ?

    Selon Jean Piaget, quatre facteurs interviennent dans le développement mental.

    Le premier de ces facteurs est la maturation nerveuse.

    la maturation ouvre des possibilités. Elle doit se doubler par l'exercice et le fonctionnement. la maturation est un facteur nécessaire dans la genèse, mais elle n'explique pas tout le développement.

    Le second facteur, c'est l'exercice et l'expérience acquise dans l'action effectuée sur les objets.

    ce facteur est essentiel et nécessaire.

    Piaget distingue l'expérience physique et l'expérience logico-mathématique.

    L'expérience physique consiste à agir sur les objets pour en abstraire les propriétés.

    L'expérience logico-mathématique consiste également à agir sur les objets mais pour connaître le résultat de la coordination des actions.

    L'expérience physique est donc une structuration active et assimilatrice à des cadres logico-mathématiques.

    En conséquence, l'élaboration des structures logico-mathématiques précède la connaissance physique.

    Un troisième facteur concerne les interactions et les transmissions sociales.

    Le langage est sans contestation possible un facteur de développement. Le développement opératoire devance l'expression verbale. Le niveau des opérations concrètes le démontre assez : on y voit que l'opération est beaucoup plus proche de l'action que de la verbalisation !

    Si le milieu social apporte une grande richesse dans la réalisation verbale, cela ne permet en rien de préjugerdu niveau des structures logiques.

    L'enseignement véhicule davantage un savoir, le plus souvent verbal, qu'il ne met les enfants en état d'exercer leurs structures et d'en acquérir d'autres.

    Les apprentissages scolaires ne sont possibles et efficaces que s'ils s'appuient sur des structures antérieurement acquises et que s'il contribue autant à les renforcer par l'exercice qu'à favoriser leur développement.

    Pour assimiler, il faut des structures d'assimilation !

    Enfin, le quatrième facteur intervenant dans le développement mental, c'est l'équilibration, le plus important pour Piaget.

    Les opérations se construisent de façon continuelle par l'abstraction réfléchissante qui réfléchit sur un plan supérieur la structure élémentaire initiale, la reconstruit et l'élargit.

    Les abstractions réfléchissantes constituant ainsi à transformer les objets ou les situations, elles ne s'exercent qu'à l'occasion de problèmes, de conflits, de déséquilibres.

    Or, la reconstruction opérée consiste à rétablir l'équilibre antérieur en élargissant le champ de l'équilibre par une modification des structures.

    Ainsi, dans le domaine intellectuel, la notion d'équilibre se caractérise par la compensation. l'équilibre est mobile de telle sorte qu'en présence de perturbations extérieures, le sujet cherche à les réduire par des compensations de sens inverse. C'est pourquoi, l'équilibration conduit à la réversibilité, propriété des structures opératoires.

    Comme processus, elle mène les opérations vers des formes d'équilibre toujours plus larges et de niveaux supérieurs, les formes inférieures n'étant que des formes d'équilibre approchées.

    29. QU'ENTEND-ON PAR "DÉCALAGE HORIZONTAL" ET  "DÉCALAGE VERTICAL" ?

    La notion de décalage est de nature à faire obstacle à la généralisation des stades. Elle peut introduire des considérations de prudence et de limitation. Un décalage est la répétition ou la reproduction du même processus formateur à des âges différents.

    Piaget distingue des décalages horizontaux et des décalages verticaux.

    Les décalages horizontaux se rencontrent dans une même période de développement, quand une même opération s'applique à des contenus différents.

    Exemple : vers 7 - 8 ans, un enfant sait sérier, classer, dénombrer des quantités de matière, de longueur... Il parvient à des notions de conservation relatives à ces contenus. Mais il est encore incapable de ces mêmes opérations pour ce qui concerne le poids. Il lui faudra encore deux ans pour parvenir à la conservation du volume. 

    Si les opérations en jeu sont dans chaque cas les mêmes, les contenus sont cependant différents.

    Dans une évaluation de longueurs par exemple, un décalage horizontal que l'on constate, c'est quand l'enfant est capable de hiérarchiser les longueurs ou n'est pas capable de les hiérarchiser.

    S'il s'agit - par exemple - de faire ranger des bandelettes par ordre de grandeur croissante, l'enfant, par intuition, dira comment es classer (1er stade) ; l'enfant, par manipulation et comparaison, dira comment les classer (2ème stade) ; l'enfant, en observant l'origine de chaque segment, dira comment ils doivent être classées (3ème stade) ; ou bien il sera capable, sans avoir rapproché les bandelettes les unes des autres, de les classer dans le bon ordre.

    On dit qu'il y a un décalage horizontal lorsque l'enfant n'est pas capable d'emblée de hiérarchiser les dimensions..

    Les décalages verticaux ne se produisent plus à l'intérieur d'une même période ! Au contraire, ils consistent à reconstruire une structure au moyen d'autres opérations.

    Ainsi, par exemple, à la fin de la période sensorimotrice, un jeune enfant a établi le groupe pratique des déplacements. Quelques années plus tard, lorsqu'il s'agira pour lui de se représenter les mêmes déplacements, c'est-à-dire de les imaginer, de les intérioriser, en opération, on retrouve des étapes analogues de formation, mais sur un autre plan cette fois, celui de la représentation.

    On dit aussi qu'il y a un décalage vertical, par exemple dans le cas où l'enfant qui a acquis la possibilité de classer par ordre de grandeur des longueurs,  se trouve décalé par rapport aux surfaces parce qu'il y a deux dimensions. Il devra recourir à la superposition des formes pour les hiérarchiser.

    La notion de décalage est une des notions les plus difficiles de Piaget. Elle est d'autant plus difficile qu'elle apparaît sous diverses formes. On peut en parler à propos de la représentation de l'espace, de la mesure et du langage, du jugement moral.

    30. QUELS SONT LES PRINCIPES PÉDAGOGIQUES FONDAMENTAUX DE PIAGET ?

    1. L'apprentissage doit être un processus actif car la connaissance doit être une charpente et non une façade.

    C'est l'enfant qui doit faire son propre apprentissage.

    On ne peut développer l'intelligence d'un enfant par le seul fait de lui parler.

    On ne peut faire de bonne pédagogie sans mettre l'enfant en situation, là où il va expérimenter lui-même, manipuler des symboles, poser des questions et chercher ses propres réponses.

    2. Les interactions sociales sont très importantes parmi les enfants à l'école.

    Pour Piaget, le développement intellectuel suppose non seulement la coopération des enfants avec des adultes mais aussi la coopération des enfants entre eux.

    L'enfant auquel on ne permet pas de voir la relativité des perspectives reste prisonnier de son propre point de vue, naturellement égocentrique.

    Un conflit d'opinions entre enfants peut leur faire prendre conscience immédiatement de l'existence de différents points de vue.

    Ce sont donc les enfants de même niveau qui peuvent, souvent mieux que l'adulte, aider leurs pairs à vaincre leur égocentrisme. 

    3. L'action intellectuelle doit se fonder en priorité sur l'expérience immédiate plutôt que sur le langage.

    Le langage a son importance mais il ne doit pas agir au détriment de la pensée.

    Aussi riche et variée qu'elle puisse être, l'expérience seule ne suffit pas. Il faut aussi tenir compte du stade de développement de l'enfant.

    Ce qui, aux yeux de Piaget, rend une méthode "active", ce n'est pas l'activité déployée en surface de celui qui apprend. Socrate, par exemple, utilisait une méthode active fondée sur le langage, et dont le but était d'amener le disciple à participer activement à l'élaboration de son propre savoir.

    Pour Piaget, le but de l'enseignement est d'opérer la transformation de la constitution psychobiologique de l'enfant et lui permettre de se mouvoir dans une société qui privilégie certaines valeurs sociales intellectuelles, morales. Le but de la société est de créer des valeurs et un savoir nouveaux.

    31. QUELLES SONT LES CONSÉQUENCES DE LA THÉORIE DE L'INTERACTION DE PIAGET SUR LES PROCESSUS PÉDAGOGIQUES ?

    1. Arriver à faire coexister dans une même classe les 4 facteurs nécessaires au développement cognitif (maturation, expériences avec des objets physiques, interactions sociales, processus d'équilibration) suppose que l'on conçoive la SPONTANÉITÉ comme forme supérieure de l'organisation.

    Donc, lorsque l'instituteur parvient à connaître le niveau opératoire de chaque enfant, il doit enseigner de façon que tous ces facteurs soient mis en oeuvre ! 

    2. Etant donné que la connaissance s'acquiert par un processus de construction, les méthodes directes d'enseignement sont bannies, particulièrement dans le domaine logico-mathématique.

    Établir un échange avec les enfants et les amener à expérimenter leurs propres hypothèses sur les objets et sur les êtres humains est un art.

    Pour le développement de leur intelligence, il vaut mieux laisser les enfants se poser des questions et éveiller leur curiosité. 

    3. Si nous voulons que l'apprentissage soit suffisamment solide et durable pour permettre le développement de la connaissance, tout au long de la vie de l'enfant, il faut

    • laisser l'enfant passer par toutes les étapes de l'erreur plutôt que de s'attendre qu'il raisonne avec la logique d'un adulte
    • accepter une certaine lenteur dans le processus de développement.

    S'il est important de laisser l'enfant progresser dans l'erreur, c'est qu'il y a dans la notion d'erreur une part de vérité.

    Dans cette pédagogie de la maturation, le rôle du maître se borne à attendre que l'enfant soit prêt. 

    4. L'intelligence constituant une structure totale, organisée, cohérente, et non un ensemble de techniques, le savoir, une fois acquis, ne s'oublie pas. Une fois que l'enfant a construit la structure cognitive du nombre, il ne l'oublie pas et cette structure fera intégralement partie des structures de son évolution ultérieure.

    Il y a bien sûr des techniques qu'on apprend (lire, écrire, compter, sauter, coller, ...) mais elles doivent être traitées en outils, au service de la vie de l'esprit.

    Une fois en possession de structures cognitives bien élaborées, l'enfant peut donner une réponse correcte, et cela à une multitude de questions, par la simple nécessité logique.

     

    Il faut retenir de l'apprentissage et de l'enseignement selon Piaget que, si tout le réseau des processus de réflexion se développe bien, l'enfant pourra, parvenu à un haut niveau d'intelligence, comprendre toutes sortes de problèmes. Si le problème est appréhendé à travers des structures bien élaborées, la solution apparaît d'elle-même, comme une nécessité logique.

     

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